mon blog à histoires

Bonjour à tous et bienvenue dans mon blog à histoires. Ecrites pour les enfants et publiées dans différents magazines spécialisés depuis 2005, celles-ci peuvent être lues ou racontées sans restriction aucune (dans le respect du droit d'auteur bien entendu). N'hésitez pas à me solliciter ou à me laisser vos commentaires. Bonne lecture !

vendredi, juillet 07, 2006

"Manon : La petite Princesse catastrophe"

Manon n’a pas très envie d’aller se coucher ce soir. Dehors, il fait encore clair et puis il y a ces bonnes odeurs de cuisine qui montent jusque dans sa chambre. Elle tente de retarder le moment du dodo mais sa maman demeure inflexible. « Même s’il n’y a pas école demain, tu as grand besoin de sommeil ma chérie ! », lui dit-elle en la bordant.

Mais Manon est une petite fille têtue. A peine sa maman est-elle sortie de la chambre, elle se glisse hors de son lit, enfile son peignoir et ses chaussons de princesse. Elle descend les escaliers menant vers la cuisine, à pas de loup. Un bruit attire son attention ! Elle se cache vite derrière une porte, juste à temps pour voir sa maman sortir de la salle de bain.

Les odeurs de dessert sucré sont vraiment trop fortes ! Manon ne résiste pas à la tentation et se glisse dans la cuisine, à l’insu de Samantha, la cuisinière. Derrière son dos, la petite princesse observe tout ce que fait Samantha. Elle plonge son doigt dans la sauce au chocolat et dit : « moi j’y mettrais un peu plus de sucre si j’étais toi ! ».

Surprise par la visite de Manon, Samantha sursaute et laisse tomber un plat en verre au sol. Il se casse en mille morceaux à ses pieds. Manon est vraiment désolée. « Laisse, c’est de ma faute, je vais ramasser !», dit-elle. Mais la maman de Manon, alertée par le bruit, entre dans la cuisine. Manon se cache dans l’armoire à provisions.

La maman de Manon est très fâchée sur Samantha. « Comment peut-on être si maladroite ?! », lui dit-elle. Dans l’armoire, Manon a un peu honte de laisser Samantha se faire gronder. Mais elle n’ose pas sortir. Car Samantha se ferait gronder encore plus si sa maman découvrait que la cuisinière permet à sa fille de se cacher dans les armoires de la cuisine.

Ouf, la voilà qui est partie ! Manon sort de l’armoire et s’excuse auprès de Samantha. Mais la cuisinière lui ordonne de quitter la cuisine sans plus attendre. Manon passe devant le bureau de son papa. La porte est entrouverte. La tentation est grande d’aller se glisser sur ses genoux. Lui, c’est sûr, il ne la grondera pas !

Manon pousse la porte tout doucement. Son papa est absorbé par la lecture d’un document. A voir son air sérieux, cela doit être très important. « Que fais-tu là ? », lui dit-il d’un ton grave. « Je ne suis pas fatiguée ! », répond Manon. Avec ses petits airs de princesse malheureuse, elle réussit à attendrir son papa qui la laisse grimper sur ses genoux.

Mais des pas se font entendre dans le couloir. « C’est maman ! S’il te plaît, ne lui dit pas que tu m’as vue ! », dit Manon en sautant des genoux de son papa. Au passage, elle renverse le grand verre d’eau qui se trouvait sur le bureau. Les documents sont trempés. Le papa de Manon peste au moment où la maman entre dans la pièce. Manon s’est cachée.

« Mais qu’est-ce qui vous arrive à tous aujourd’hui ? », dit la maman de Manon à son mari. « Le dîner va être servi, si tu veux bien te sécher avant de passer à table », dit-elle en désignant son pantalon. Manon sort de sa cachette. Le pantalon du papa est tout mouillé et ses documents sont illisibles. Il gronde Manon et l’envoie dans sa chambre avec autorité.

La petite princesse est très triste ce soir. Décidemment, tout le monde lui en veut. Elle décide à contrecoeur de retourner sous la couette. Mais attention à ne pas croiser maman ! Manon s’avance prudemment dans le long couloir, comme si elle marchait sur des œufs. Elle ne voit pas la queue de Tommy le chat qui traînait par là. Elle l’écrase !

Le pauvre Tommy hurle et se précipite dans les couloirs. Il vient buter contre Samantha qui sortait de la cuisine avec un plat de haricots fumants. Au même moment, le papa de Manon tout beau, tout propre passait par là. Et bardaf ! Le voilà couvert de haricots. Il en a plein les cheveux et le beurre fondu coule sur sa chemise. La maman de Manon n’en croit pas ses yeux.

« Samantha, qu’est-ce qui vous arrive ce soir ?», dit-elle un peu excédée. Samantha se confond en excuses auprès du papa. « Ce n’est pas de sa faute, c’est le chat, je l’ai vu ». « Oui c’est vrai ! » ajoute Samantha. « Je l’ai entendu crier, comme si quelqu’un lui avait marché sur la queue ! ». « Mais qui donc ? », demande la maman de Manon.

« Manon ! », s’exclament en même temps Samantha et le papa. Tous deux grimpent les escaliers quatre à quatre, laissant la maman de Manon, complètement perdue, au milieu du couloir. « Impossible, je l’ai couchée il y a plus d’une heure déjà », dit-elle. Lorsque le papa de Manon et Samantha entrent dans la chambre, la petite princesse fait semblant de dormir.

Tous deux s’approchent d’elle. Elle a les yeux fermés et la bouche entrouverte. Sa respiration est régulière. « Je sais que tu fais semblant ! », dit le papa. « Oui, allez, réveille-toi tout de suite ! », ajoute Samantha. « Non mais vous êtes fous tous les deux ! », dit la maman. « Laissez-la, vous voyez bien qu’elle dort profondément ! ». Elle les pousse vers la sortie.

Samantha retourne à sa cuisine et le papa, à la salle de bain. Dans sa chambre, Manon soupire, elle l’a échappé belle. Elle soulève les draps car elle s’est recouchée avec son peignoir et ses chaussons. « Qu’il fait chaud ! », dit-elle. Elle ouvre la fenêtre de sa chambre mais catastrophe : elle a oublié le pot de fleurs qu’elle y avait posé…

En bas, la maman de Samantha qui était sortie un instant, se retrouve avec le pot sur la tête. Sa belle robe blanche est pleine de terre. Cette fois-ci, la petite princesse catastrophe est démasquée !


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Princesse Lecture (Avril-Mai 2006 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

"Benjamin sauve son professeur"

Benjamin a beaucoup de mal à se lever ce matin. Il n’a vraiment aucune envie d’aller à l’école. Papa et maman sont déjà partis. Ils avaient tous deux un rendez-vous de travail très important. Aujourd’hui, c’est donc Angela, la grande sœur de Benjamin, qui doit s’occuper de lui. Angela est douce et compréhensive avec son frère. Car il lui est déjà arrivé, à elle aussi, de ne pas avoir envie de d’aller à l’école. « Mais tu sais, j’ai appris qu’il y a tous les jours une bonne raison de se lever », lui dit-elle. Benjamin sort enfin du lit et se traîne jusque dans la salle de bain.

Les mots d’Angela résonnent dans la tête de Benjamin alors qu’il termine sa toilette. « Elle a certainement raison Angela », se dit-il. « Après tout, il va peut-être se passer quelque chose d’intéressant aujourd’hui ! ». L’idée qu’une surprise peut surgir à chaque coin de rue réjouit soudain Benjamin. Il descend quatre à quatre les escaliers et se hâte d’enfiler sa veste. Angela est très fière d’avoir réussi à rendre le sourire à son petit frère. Elle lui tend la main et, ensemble, ils sortent de la maison. Angela vérifie que la porte d’entrée est bien fermée.

La raison du trouble de Benjamin et de ses camarades, c’est lui : Monsieur Leroy, le professeur de CE2. En l’apercevant avec son air sévère au milieu de la cour de récréation, Benjamin est un peu déçu. Car, en secret, il avait espéré qu’on lui annonce qu’à partir d’aujourd’hui, il allait avoir un nouveau professeur. Benjamin lance à Angela son regard le plus triste. Comme elle le comprend ! Elle aussi, il y a deux ans, elle est passée par là ! Mais, avec le recul, elle a appris à apprécier le vieux professeur. Elle s’efforce de sourire à son petit frère qui baisse la tête et va rejoindre ses camarades dans le rang.

Comme tous ses camarades de classe, Benjamin trouve que Monsieur Leroy est trop dur et un peu « démodé ». Mais il ne souhaite pas pour autant qu’il arrive quelque chose de grave à son professeur. D’abord parce que le vieil homme n’est pas méchant. Ensuite parce que les parents de Benjamin lui ont appris à respecter les autres. « On rencontre parfois dans la vie des gens qui ne nous plaisent pas », lui répète souvent sa maman. « Ce n’est pas une raison pour souhaiter qu’il leur arrive un malheur !». Benjamin sait que sa maman a raison. « Il ne me reste plus qu’à compter les jours », se dit-il.

La journée semble longue. Voilà plus de deux heures que le vieux professeur parle sans cesse. Qu’il s’agisse de mathématiques, de français ou de géographie, Monsieur Leroy a toujours cette même voix ennuyeuse. Benjamin regarde ses camarades autour de lui et observe leur visage fatigué. Il se tâte les joues pour vérifier si lui aussi fait cette drôle de tête. Soudain, on frappe à la porte. Le directeur de l’école entre, accompagné d’une jeune femme au sourire radieux. En l’apercevant, le visage de Benjamin s’éclaircit. Il le sent : on va leur annoncer une bonne nouvelle !

« Les enfants, je vous présente Mademoiselle Richard », annonce le directeur. « C’est une jeune enseignante qui effectue un stage chez nous ». Monsieur Leroy est resté un peu en retrait. Il est très contrarié à l’idée que quelqu’un vienne interrompre son cours. Les enfants quant à eux se sont réveillés, comme par magie. Ils ne parviennent pas à détacher le regard de la jeune maîtresse. « C’est elle qui va vous donner cours pour le restant de la journée », dit le directeur. Les enfants, fous de joie, n’en croient pas leurs oreilles. Certains applaudissent même.

A peine le directeur est-il sorti, Monsieur Leroy calme ses élèves. « Avant de laisser Mademoiselle Richard vous donner cours, je voudrais en terminer avec cette leçon », dit le vieux professeur d’une voix sévère. Les enfants, bien que déçus, n’osent pas protester. « Si vous me le permettez », dit le professeur, d’une voix plus douce cette fois, à l’attention de la jeune maîtresse. « Mais bien entendu Monsieur Leroy », répond-elle. Elle se dirige alors vers le seul banc libre de la classe et prend place juste à côté de Benjamin. Au passage, elle lui adresse son plus joli sourire.

Quinze longues minutes ses ont écoulées. Le professeur Leroy a terminé et Mademoiselle Richard peut enfin commencer son cours. Le vieux professeur range soigneusement ses affaires et lui fait de la place sur sa table. « Pour y déposer vos manuels de cours », lui dit-il. « C’est très aimable à vous professeur, mais je n’en aurai pas besoin !», répond-elle. Monsieur Leroy s’étonne un peu de cette réponse. Il hausse les épaules et vient se mettre au fond de la classe, à côté de Benjamin. Sans attendre, il se plonge dans les corrections des tests de mathématiques.

« Les enfants, je propose que vous m’appeliez Hélène, puisque c’est mon prénom ! », dit Mademoiselle Richard en commençant son cours. « Bonjour Hélène », disent les enfants, d’une seule voix. Le professeur Leroy sursaute et hoche la tête en signe de mécontentement. « Il y a des milliers de façons d’enseigner, mais il n’y en a qu’une seule d’apprendre », reprend la jeune maîtresse. « Et ce n’est certainement pas en restant assis sur un banc à ne rien faire. Alors suivez-moi, nous sortons ! ». Les enfants se regardent, étonnés. Benjamin se lève sans la moindre hésitation, imité par tous ses camarades ».

Dans le plus grand silence, les enfants suivent leur nouvelle maîtresse dans les couloirs de l’école. Puisqu’il fait bon dehors, pas besoin de veste ! Elle les emmène dans la cour de récréation et s’arrête juste sous le panier de basket. « Ici c’est un terrain de sport, n’est-ce pas ? ». Les enfants font oui de la tête. « Et bien moi je trouve que c’est un merveilleux endroit pour le cours de français ». Les enfants sont un peu perdus. Ils n’ont pas l’habitude de ce genre de méthode. Certains sont même méfiants. Benjamin, lui, est complètement sous le charme. Il s’assied à terre le premier.

Depuis la fenêtre de la classe, le professeur Leroy observe ce qui se passe dans la cour. Il désapprouve les nouvelles techniques d’enseignement. Mais soudain, il se raidit, pris d’une douleur au ventre ! Il a du mal à se tenir debout et titube jusqu’à son bureau. Dehors, le cours a commencé « Cherchons des mots rigolos !», dit Hélène à ses petits élèves. Personne n’a d’idée. « Allons, il y a bien des mots qui vous font sourire quelque fois !? ». « Est-ce que les gros mots ça compte ? », demande Aurélien. « Non, pas de gros mots », dit Hélène. « Sinon ce serait trop facile, d’autant que je suis sûre que tu en connais des tas ».

« Somnambule ! », s’écrie Benjamin. Ses camarades se tournent vers lui. « Oui, très bien ! En voilà un mot rigolo : somnambule ! Et tu sais comment cela s’écrit ? ». Benjamin épelle le mot sans faire de faute. « Facile ! », lui crie Amanda, la plus douée des élèves de la classe. « Et qu’est-ce que vous dites de celui-là : concupiscent », ajoute la petite fille. « C’est un gros mot ! », dit Aurélien. « Ah ah, pas du tout ! », dit Hélène en riant. « C’est même un mot très difficile, sais-tu ce que cela signifie ? ». Personne ne connaît ce mot. « Je vais chercher le dictionnaire », dit Benjamin en se levant.

Benjamin déboule dans la classe et découvre avec surprise le professeur Leroy, affalé sur son bureau. « Professeur ! », dit-il, un peu craintif. « Est-ce que vous vous sentez bien ? ». Mais Monsieur Leroy ne répond pas. Benjamin s’approche de son professeur et comprend rapidement qu’il a été victime d’un malaise. Il se met à courir du plus vite qu’il peut dans les couloirs de l’école. Il n’y a pas une minute à perdre ! Arrivé à l’infirmerie, il est trop essoufflé pour expliquer la situation. Il emmène de force Hélène, l’infirmière, qui renverse son café sur blouse blanche.

Lorsque Hélène découvre Monsieur Leroy inanimé, elle envoie Benjamin chez le directeur. « Fais vite », lui dit-elle en prenant le pouls du professeur. « Il respire, ce n’est sûrement pas grave, mais il vaut mieux ne prendre aucun risque !». Benjamin traverse la cour de récréation à toute vitesse. La nouvelle maîtresse s’étonne de le voir revenir sans dictionnaire mais Benjamin ne s’arrête pas. « Excusez-moi mais le Professeur Leroy s’est évanoui en classe », dit-il tout de même au passage. Les enfants se lèvent tous en même temps et retournent en vitesse dans le bâtiment.

Benjamin et le directeur se frayent un passage parmi les enfants entassés à l’entrée de la classe. Le professeur a repris ses esprits, au soulagement de tout le monde. « Rien de grave, Monsieur le directeur ! », annonce Hélène. « Grâce au sang-froid de Benjamin, j’ai pu agir à temps ». Le professeur Leroy a beaucoup de mal à parler, il est encore sous le choc. Il se lève à grand peine et vient se poster devant Benjamin. « Merci, mon garçon », dit-il en posant la main sur le haut de la tête du jeune garçon. « Je n’oublierai jamais ce que tu as fait pour moi ! ».

Depuis ce jour, Monsieur Leroy et Benjamin ont de longues conversations pendant la récréation. Le vieux professeur écoute attentivement les conseils de Benjamin pour être plus apprécié de ses élèves. Quant à Benjamin, il fait pression sur le professeur pour qu’il donne son cour de français sous le panier de basket…


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et propriété de GO MULTIMEDIA SARL. Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

"Pody va chez le dentiste"

La journée a été particulièrement chaude dans la jungle. La nuit est enfin tombée et les animaux sont parvenus à s’endormir. « AAAAAAAAAAAAAH ! ». Mais quel est donc ce cri de douleur qui retentit au beau milieu de la nuit ? Les animaux sont réveillés et se précipitent auprès de Pody, le paresseux. Suspendu comme d’habitude à son arbre, il hurle de douleur.

« Qu’est-ce qui t’arrive », demande le tapir ? « C’est bien toi qui a crié n’est-ce pas ? ». Pody a vraiment l’air mal en point. Le paresseux pleure doucement de douleur. Sa joue est toute gonflée, il est victime d’une rage de dents ! L’éléphant essaye de le consoler. « J’ai si mal aux dents que je n’arrive même plus à dormir ! », affirme le pauvre Pody.

« Il faut absolument l’emmener chez le dentiste », dit soudain le tigre. « A cette heure ? », rétorque le babouin. « Aucune chance de le trouver éveillé ! ». « Et comment va-t-on faire ? », demande le jaguar ? « Vous savez bien qu’il lui faut des heures pour descendre de son arbre ». L’éléphant réfléchit un instant. « Laissez-moi faire », dit-il enfin.

Un groupe de chauves-souris appelées à la rescousse agrippent le pelage de Pody. Sans le moindre effort, le paresseux se laisse détacher de son arbre. Délicatement, les chauves-souris déposent Pody sur le dos de l’éléphant. « Tu es bien installé comme ça ? », demande l’éléphant. « Avec un petit coussin, ce serait plus confortable », répond Tody, un rien malicieux.

Pody est si bien installé sur le dos de l’éléphant qu’il a fini par s’endormir, oubliant sa douleur. « C’est tout de même incroyable », affirme le babouin. « Il passe ses journées à dormir et la nuit, bardaf, il nous réveille ». « Oui, et qui est-ce qui aura mal à la tête de fatigue toute la journée demain ? », demande le tapir. « Nous ! », répondent en cœur tous les animaux.

Le Docteur Saki, un grand singe à barbe blanche, est réveillé par l’arrivée des animaux. Pody, lui, est toujours endormi. Il ronfle même bruyamment. « L’avantage avec Pody, c’est qu’il ne faut jamais l’endormir pour opérer », affirme le docteur. Tout le monde rit gaiement malgré la fatigue du voyage. Le dentiste soigne la dent douloureuse du paresseux.

Quelques minutes ont suffi ! Et Pody ne s’est même pas réveillé. Les animaux rebroussent chemin. Les chauves-souris doivent se hâter de rentrer avant que le jour ne se lève. Dans un dernier effort, elles reposent Pody sur sa branche. Pody, au prix d’un effort surhumain, soulève une paupière et dit : « Merci les amis ! », avant de se rendormir aussi vite.


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"Jangada au pays des toucans"

Le jour s’est levé sur la jungle amazonienne. Dans les tentes dressées par un groupe d’explorateurs en mission, tout est encore calme. Les restes du repas de la veille ont attiré quelques singes qui rôdaient autour du campement. Soudain, un chant merveilleux se fait entendre. Jangada, un petit garçon de cinq ans, passe timidement la tête hors de sa tente.

En pyjama, les yeux marqués par une trop courte nuit de sommeil, Jangada s’avance dans la jungle. Le petit explorateur voudrait bien s’amuser avec les singes. Il leur présente Patapon, son ours en peluche, mais les singes en ont peur. Ils fuient en poussant des cris aigus. « Revenez ! », leur dit-il en vain. « Il ne va pas vous manger ».

Jangada sait qu’il ne devrait pas trop s’éloigner des tentes. Si son papa se réveille et ne le voit pas, il risque de le gronder. Mais le merveilleux chant se fait entendre une fois encore et Jangada ne résiste pas. Il s’enfonce un peu plus loin dans la jungle. Guidé par le chant qu’il imite à son tour, il arrive enfin au beau milieu d’une clairière.

C’est là qu’il aperçoit un superbe oiseau au bec rouge et aux yeux bleus. Il n’en a jamais vu de pareil. « T’es qui toi ? », demande Jangada au bel oiseau. « Je suis un toucan », lui répond l’animal. « Un toucan, pour de vrai ? », s’étonne le petit garçon. « Que tu es beau ! ». « Et toi, t’es qui toi ? », interroge l’oiseau. « Je m’appelle Jangada ».

« Tu as une bien jolie voix », dit Jangada au toucan. « Tu pourrais m’apprendre à chanter comme toi ? ». Le toucan lui fait entendre le son de sa voix. Jangada essaye de l’imiter et y parvient de bien belle manière. Sa voix porte si loin qu’elle réveille tous les toucans de la jungle. L’un après l’autre, les toucans quittent leur repère pour rejoindre la clairière.

Lorsque Jangada cesse de chanter, il aperçoit des dizaines de toucans qui se sont posés autour de lui et de son ami. Ils le regardent, en admiration. « Excusez-moi », dit Jangada, embarrassé. « Je ne voulais pas vous réveiller ». « Ne t’inquiète pas mon garçon », lui dit un des toucans. « Continue, ta voix est superbe ». Jangada se remet alors à chanter.

Au campement, le papa de Jangada se réveille en sursaut. N’apercevant pas son fils, il bondit hors du lit et part à sa recherche. Il croit reconnaître la voix de son petit garçon et se dirige vers la clairière. Quel soulagement lorsqu’il l’aperçoit en train de chanter, entouré de tous ces magnifiques toucans ! « Voilà une belle journée qui s’annonce », se dit-il, enfin rassuré.


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et propriété de GO MULTIMEDIA SARL. Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

"Rico, un chimpanzé très gourmand"

Rico est le plus populaire de tous les animaux du cirque. Les enfants viennent spécialement pour le voir lui, le chimpanzé rigolo. Mais Rico a un vilain défaut : il est très gourmand ! S’il n’a pas tous les jours sa ration de bananes, il est de très mauvaise humeur. Et aujourd’hui justement…

Corano, le cuisinier du cirque, est revenu du marché matinal complètement désespéré. Il n’a pas pu trouver la moindre banane. « Il n’y en avait plus une seule !», dit-il au directeur du cirque. Celui-ci est très embêté. Car il sait que, sans ses bananes, Rico refusera de faire son numéro.

Et en effet, Rico a mauvais caractère ! Lorsqu’il apprend que personne n’est capable de lui trouver des bananes, il tourne le dos au directeur. Celui-ci lui promet une double ration pour le lendemain mais rien à faire ! Rico est têtu comme une mule. Sa double ration, c’est aujourd’hui qu’il la veut !

Les spectateurs commencent à se presser aux guichets du cirque. Les enfants se réjouissent de voir le spectacle du petit chimpanzé. Tout le monde en parle en ville ! « T’es sûre qu’on va le voir pour de vrai, Rico ? », demande un petit garçon à sa maman. Le Directeur est de plus en plus inquiet !

« Et si on demandait aux spectateurs de payer en bananes ? », dit soudain Corano le cuisinier. « Mais bien sûr !», répond le directeur. « Les enfants ont toujours une banane dans leur sac quand ils viennent au cirque ». Le directeur court vers le guichet et annonce le nouveau tarif : une banane pour une entrée !

En moins d’un quart d’heure, la caissière du cirque est envahie de bananes. Il y en a tant qu’elle n’arrive presque plus à bouger derrière son guichet. Des cartons entiers, remplis de bananes, sont apportés à Rico qui a retrouvé sa bonne humeur. « Allons, en piste ! », annonce enfin le directeur.

Rico est accueilli par les spectateurs en véritable star. L’ambiance est extraordinaire. Son numéro est le plus grandiose de l’après-midi : le clou du spectacle ! De temps en temps, il disparaît derrière le grand rideau rouge. Et essayez de deviner pour quoi ? Pour manger une banane bien sûr !


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"Ernest le clown dresseur de lions"

Le cirque du village affiche complet aujourd’hui ! Les enfants ont pris place dans les gradins. Ils rient aux éclats lorsque Ernest le clown reçoit des coups de marteau en mousse de son ami Pipo. En coulisses, par contre, c’est la panique ! Personne ne sait où se trouve Arthur, le dresseur de lions.

Arthur est cloué au lit avec une vilaine grippe. Il aurait bien voulu prévenir le cirque de son absence mais… il n’a même pas la force de se lever. De plus, il sait que le directeur du cirque est lui aussi dresseur de fauves. Il pourra donc facilement le remplacer.

Seulement voilà : aujourd’hui le directeur est allé rendre visite à une mystérieuse inconnue. Ernest sent le regard des autres se poser sur lui. Finalement, en l’absence du directeur, c’est lui le responsable du cirque. « Oh non, non ! Pas les lions ! », dit-il en marchant à reculons vers la sortie.

Pipo agrippe son compagnon par les bretelles qui, telles un élastique, se tendent et envoient le pauvre Ernest au centre de la piste. Les enfants sont ravis : ils admirent le courage d’Ernest et lui réservent une véritable ovation. Mais derrière lui, les fauves se sont rapprochés : ils rugissent !

Les premiers coups de fouet en l’air d’Ernest n’impressionnent pas les lions. Au contraire, on dirait que cela les rend encore plus furieux. Les enfants retiennent leur souffle. Le pauvre clown est rapidement encerclé par la meute de lions. Chacun se demande comment il va pouvoir s’en sortir !

Alors que tout semble perdu, une idée de génie traverse l’esprit d’Ernest. Face à la gueule grande ouverte du plus féroce des lions, il sort le grand marteau en mousse de son pantalon. Et il se met à se frapper sur la tête ! L’animal, surpris, recule et observe le clown qui déclenche les rires des enfants.

Pour Ernest, c’est le jour de gloire ! Les lions n’ont plus du tout envie de croquer le clown. Au contraire, ils s’amusent avec lui et obéissent à chacun de ses mouvements. Ensemble, Ernest et les lions réalisent un numéro comique extraordinaire. Depuis ce jour, ce sont eux les stars incontestées du cirque.


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Palomina dans "Les nouvelles amies de Palomina"

Pour les vacances, la directrice de l’école des poneys a demandé à chacune de ses élèves d’accueillir une camarade venue de l’étranger. Palomina a vraiment hâte de découvrir sa nouvelle amie. Elle s’appelle Noma et elle vient du Japon. Lorsque le train arrive enfin en gare, le cœur de Palomina se met à battre plus rapidement que d’habitude.

Noma, la ponette japonaise, est vraiment minuscule. Si petite qu’elle passe inaperçue parmi les autres poneys venus d’Angleterre, d’Espagne et même d’Islande. « Bonjour, je suppose que tu es Palomina ? », lui dit Noma. Elle se penche vers elle, dans la plus pure tradition japonaise. « Tu en as de la chance », lui glisse son amie Arabesque. « La mienne ne parle pas un mot de français ».

Palomina et Noma s’entendent tout de suite très bien. Malgré la distance qui sépare leurs deux pays, elles ont des tas de points communs. Après quelques jours passés ensemble, à faire de longues promenades dans la campagne, Palomina a même appris quelques mots en japonais. « Et si on allait voir comment cela se passe chez Arabesque ?», demande un jour Noma.

Les deux amies arrivent chez Arabesque. Elles la trouvent seule, triste, près de la rivière. « Que t’arrive-t-il ? », interroge Palomina. « Je m’ennuie », dit-elle. « Sasja et moi, on ne s’entend pas très bien ». « Où est-elle ? », demande Noma. Arabesque désigne le pont sur la rivière. Sasja, la ponette islandaise, s’y trouve. Elle regarde, triste elle aussi, le fond de l’eau.

« Si on faisait un jeu toutes les quatre ? », propose Noma. « Tu peux essayer », répond Arabesque. « Le problème c’est qu’elle ne comprend rien à ce qu’on lui dit, j’ai déjà tout essayé ». « Pas besoin de mots pour jouer », dit alors Palomina. « Viens, on arrivera bien à trouver quelque chose pour la distraire ».

Noma, Palomina et Arabesque s’approchent de la ponette islandaise. A trois, elles miment des jeux auxquels elles aimeraient jouer avec Sasja. Mais la petite islandaise n’a vraiment pas l’air de comprendre. Soudain, Noma noue un foulard autour de ses yeux et fait mine d’attraper Palomina. Et là, c’est le déclic ! Sasja comprend directement de quoi il s’agit et se met à courir en hurlant de plaisir.

Palomina, Sasja, Noma et Arabesque sont devenues inséparables. Elles passent le reste de l’été à s’inventer des jeux et à parler un mélange de français, de japonais et d’islandais. Lorsque les vacances sont terminées, les deux petites ponettes retournent dans leur pays. Elles sont tristes mais elles promettent de se revoir très bientôt. En Islande ou au Japon ?


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine J'aime les poneys (N°4 Juillet-Août-Septembre 2006 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

Princesse Kalina dans "Noël dans le Grand Nord"

Il n’y a pas si longtemps, sur les bords de la méditerranée, vivait une jeune princesse qui répondait au nom de Kalina. Elle habitait un magnifique palais surplombant l’une des plus belles côtes du sud de l’Europe. Princesse Kalina avait tout pour être heureuse : une famille aimante, des gens de maison dévoués et un professeur particulier vraiment passionnant. Elle était en plus d’une beauté renversante et ceux qui avaient la chance de la côtoyer tous les jours ne se lassaient jamais de l’admirer.

Mais à l’approche de Noël, Princesse Kalina affichait une mine particulièrement triste. Son professeur l’avait trouvée fort distraite ces derniers temps. Il en informa le père de la jeune princesse qui vint immédiatement trouver sa fille. Kalina était dans sa chambre, accoudée devant la fenêtre, le regard porté vers l’horizon. « Que se passe-t-il donc ma fille ? », lui dit son père, « je n’aime pas vous voir porter ainsi un regard triste sur le lointain, qui plus est, à l’approche de Noël ».

« Père », lui dit la princesse, « c’est justement l’approche de Noël qui m’attriste. Je sais que Mère et vous êtes très bons pour moi mais, chaque année depuis que je suis toute petite, vous me promettez un Noël blanc. Or, regardez, une fois encore, ce ciel bleu et ce soleil ! ». Le père de Princesse Kalina regarda au dehors et aperçut ses domestiques décorant le palais pour la fête de Noël qui devait avoir lieu dans moins d’une semaine. Et ce grand sapin vert lui parut subitement très triste.

« Vous avez raison, ma fille ! », dit soudain le père de Kalina. « Cette année, nous aurons un Noël blanc et, croyez-moi, ce ne sont pas des paroles en l’air cette fois ! », ajouta-t-il. Il sortit précipitamment de la pièce, laissant là Princesse Kalina, et il rassembla à grand bruit tout le monde dans le magnifique patio au centre du palais. Son épouse, accourue à moitié coiffée, accompagnée de sa femme de chambre s’exclama : « Quelle est donc la raison de tout ce trouble ? »

« Nous partons tous pour le Grand Nord !», clama haut et fort le père de Kalina. « Vous avez une heure pour préparer ce voyage, pas une minute de plus ! ». Princesse Kalina, du haut de l’escalier, n’en crut pas ses oreilles. Elle voulut remercier son père mais n’en eut pas le temps. Elle fut happée par sa femme de chambre qui l’emmena boucler ses affaires. Quant au père de Kalina, il s’approcha doucement de son épouse et lui glissa tendrement à l’oreille : « Cela nous rappellera de bons souvenirs ».

Tout le monde fut prêt en moins d’une heure. L’excitation était bien palpable dans la petite assemblée. La mère de Kalina fit sensation en descendant magistralement l’escalier enveloppée dans une magnifique parure hivernale. « C’est vous qui me l’avez offerte il y a quinze ans, mon cher époux », dit-elle. « J’ai rarement l’occasion de la porter ici », ajouta-t-elle. « Allons, en route ! », dit le père de Kalina. Tout le monde prit place dans les magnifiques carrosses apprêtés pour l’occasion.

La route jusqu’au Grand Nord est longue, très longue. Princesse Kalina s’inquiéta de savoir si on arriverait à temps pour Noël. Assise dans son carrosse, aux côtés de son professeur, elle apprit qu’il y avait plus de 5000 kilomètres à parcourir jusqu’en Laponie, où habite le Père Noël. « Mais à ce train-là, nous n’y arriverons jamais », dit-elle au moment où le carrosse s’arrêtait ! Le professeur rit de bon cœur, passant la tête par la fenêtre. « Puisque vous parliez de train », dit-il.

Princesse Kalina sortit du carrosse, aidée par le professeur, et découvrit un magnifique train spécialement destiné au voyage vers le Grand Nord. Son père avait fait des miracles ! Elle ne put s’empêcher de courir vers lui pour l’embrasser et en profita pour étreindre sa mère qui ne lui avait jamais parue si belle dans ses habits d’hiver. « Nous serons bien mieux installés dans ce train, qu’en pensez-vous ma fille ? », dit son père. « Si tout va bien, nous arriverons dans deux jours », ajouta-t-il.

Le voyage en train fut un véritable rêve pour la Princesse. Son professeur éprouva bien des difficultés à lui faire apprendre ses leçons. Kalina courait de wagon en wagon, à l’affût du premier flocon de neige. Lorsque celui-ci apparut, elle fut la première à le remarquer. On arrêta le train et elle descendit en courant dans les champs qui se couvraient petit à petit d’un doux tapis plan. Elle se mit à danser, pieds nus, comme si elle cherchait à rendre hommage à l’hiver qu’elle n’avait jamais connu.

Plus le train avançait, plus la nuit semblait éternelle. Princesse Kalina posa mille questions à son professeur : sur le nom des villes où l’on passait, sur la langue que l’on parlait dans le Grand Nord,... Epuisé par sa jeune élève, le professeur s’endormit. Kalina s’empara des livres du professeur et s’enferma dans sa couchette. Au petit jour, le train se mit à ralentir : on approchait du but ! Kalina, qui n’avait pratiquement pas dormi du voyage, réveilla tout le monde.

Lorsqu’elle descendit du train la première, Kalina ressentit une grande joie. Malgré le froid, Noël ressemblait ici, dans le Grand Nord, à l’idée qu’elle s’en était toujours faite. Sa joie grandit encore lorsqu’elle apprit que la route se poursuivrait sur des traîneaux tirés par de grands rennes. Invitée par un vieil homme barbu à monter sur un de ces traîneaux, elle n’hésita pas un instant. Le vieil homme l’emmitoufla dans une épaisse couverture et fouetta l’air pour inciter les rennes à démarrer.

La neige tombait en épais flocons sur la campagne traversée par Kalina, ses parents et toute la suite princière. Le convoi arriva enfin aux abords d’une somptueuse demeure qui ressemblait à un palais de glace. Un couple princier qui semblait connaître les parents de Kalina depuis longtemps accueillit chaleureusement tout le monde. Kalina traversa l’entrée du magnifique palais au bras du Prince Artus, un beau et galant jeune homme qui l’accueillit avec tous les égards dus à une princesse.

A l’intérieur du palais, tout était déjà en place pour Noël. La veillée avait lieu ce soir même et les domestiques s’afféraient pour que tout soit parfait. Kalina refusa le repos conseillé par son professeur. Elle préféra la compagnie du jeune prince dont elle s’étonna qu’il parle si bien sa langue alors qu’elle ne connaissait aucune langue du grand Nord. Le Prince Artus et la Princesse Kalina ne se quittèrent qu’en fin de journée, afin de se préparer pour la grande soirée de Noël.

Kalina descendit l’escalier au bras de son père. Sa longue robe de soie rouge illumina le palais et les yeux du Prince Artus qui prit la relève à son bras. Kalina et le jeune prince dînèrent face à face, sans se quitter des yeux. La princesse rougit un peu lorsqu’elle croisa le regard de ses parents. Sa mère la prit à part et lui raconta comment elle avait rencontré son père, il y a quinze ans, ici même, à l’occasion de Noël. Kalina, ravie de cette confidence, retourna près du Prince Artus.

Après le dîner, tout le monde se rendit dans une immense salle lumineuse. Le prince invita Kalina à ouvrir le bal de Noël. Elle accepta l’invitation et, sous les yeux ravis de ses parents, elle fit au Prince Artus une démonstration de ses talents de danseuse. Pour lui, et toute l’assemblée médusée par tant de grâce, elle exécuta des pas de flamenco, une danse que le prince ne connaissait pas. « Je vois que j’ai tout de même des choses à vous apprendre », lui dit-elle, fière d’elle.

La nuit passa trop rapidement. Mais ce fut l’une des plus belles de la jeune existence de Kalina. Les adieux au prince furent longs mais joyeux. « Lorsque tu viendras chez nous l’an prochain, je connaîtrai ta langue », dit Kalina au prince. « Et moi je danserai le flamenco mieux que n’importe qui », lui promit Artus. Ils échangèrent un long baiser avant de se quitter. Depuis lors, on raconte qu’une année durant, on entendit beaucoup parler une drôle de langue dans un palais des bords de la méditerranée.


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Histoire de Fées (Novembre-Décembre 2005 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

"Princesse Atchoum"

Il a neigé la nuit dernière sur la jolie ville de Palefrois. Au petit matin, un immense tapis blanc recouvre les jardins à perte de vue. Les enfants, tout excités, jouent déjà à faire des batailles de boules de neige. Certains ont sorti leur luge et dévalent les pentes enneigées, d’autres ont même commencé à construire des bonshommes de neige. Depuis sa fenêtre, Camille observe le spectacle de ses petits voisins avec envie. Car, comme tous les enfants de son âge, elle aussi adore jouer dans la neige.

Mais aujourd’hui, pas question qu’elle sorte par ce temps ! Ainsi en a-t-elle décidé. Demain, c’est la fête à l’école. Et Camille ne veut manquer cet événement sous aucun prétexte. D’autant que, chaque année, un concours est organisé pour désigner la Princesse de l’école. Camille a l’occasion d’y participer pour la première fois. D’y participer et… de le remporter ! Camille sait bien qu’elle est l’une des plus jolies petites filles de l’école, son papa le lui répète tout le temps. Mais si elle sort pour s’amuser dans la neige, elle risque de prendre froid. Et avec un rhume et un gros nez rouge, ses chances de gagner le concours diminueraient fortement, pense-t-elle.

Thomas, le petit frère de Camille fait irruption dans la chambre de sa soeur. « Tu viens jouer avec nous ? », lui demande-t-il, tout surpris de la voir traîner encore en pyjama. « Non, vas-y sans moi, je ne me sens pas très bien ce matin ! », répond Camille en allant se réfugier sous la couette. « Il y aura Sandrine et Magali », ajoute Thomas qui tente malgré tout de convaincre sa sœur. « Dis-leur que je viendrai peut-être plus tard, lorsque je n’aurai plus mal à la tête! », lui répond Camille, pensive. « Bon, comme tu voudras. Tant pis pour toi ! », dit alors Thomas avant de disparaître.

Lorsque son frère est parti, Camille sort rapidement de son lit. Elle enfile ses chaussons, son peignoir et se rue vers la fenêtre pour observer ses deux meilleures amies dans la neige. « Quelle imprudence ! », se dit-elle. « Elles n’ont ni écharpe, ni bonnet ! ». Camille les imagine le lendemain à la fête de l’école, toussant et se mouchant tout le temps. « Pas de doute, si Magali et Sandrine tombent malades, je gagnerai le concours à coup sûr ! ». Elle se réjouit de cette perspective tout en espérant qu’elles ne soient pas trop gravement malades. Car il s’agit tout de même de ses amies !

Debout au milieu de sa chambre, Camille se demande ce qu’elle pourrait bien faire aujourd’hui ? Elle ne peut tout de même pas rester toute la journée au lit. Sa maman, alarmée par Thomas, vient aux nouvelles. « Alors, ma chérie », lui dit-elle « qu’est-ce qui ne va pas ? Tu as mal à la tête, paraît-il ?». Disant cela, sa maman pose sa main sur le front de Camille et s’étonne de ne pas le trouver chaud. Camille, embarrassée, ne veut pas mentir à sa maman. Elle lui avoue qu’elle n’a rien du tout mais qu’elle a vraiment peur de sortir. Elle veut absolument éviter d’être malade pour la fête de l’école.

La maman de Camille est rassurée mais pas très contente de l’attitude de sa fille et des histoires qu’elle invente. « Allons donc ! Il suffit de bien te couvrir et tu ne seras pas malade », dit-elle à Camille. « Habille-toi rapidement et va jouer avec tes amis, je ne veux pas que tu restes seule à la maison. Les occasions de s’amuser dans la neige sont tellement rares… ». Camille est un petit peu déçue par la réaction de sa maman. Elle s’attendait à ce que sa maman la comprenne mieux que quiconque. Car elle aussi, il y a quelques années, avait participé au concours de Princesse de l’école.

Lorsque Camille sort enfin de chez elle, après de longs préparatifs, tous les enfants s’arrêtent subitement de jouer. « Mais quelle est donc cette énorme chose ronde, emmitouflée dans une tonne de vêtements chauds », se demandent les enfants ? « On n’aperçoit même pas son visage ! ». Thomas s’approche et éclate de rire : « C’est ma sœur Camille », hurle-t-il avant de retourner auprès de ses amis. Tout le monde se moque d’elle, même ses deux meilleures amies Sandrine et Magali ne peuvent s’en empêcher. Vexée, Camille refuse de s’éloigner de la porte de la maison. Elle préfère bouder dans son coin.

Magali et Sandrine se sont approchées de leur amie. « Mais enfin Camille, c’est quoi cet accoutrement ridicule ? », lui demande Sandrine. « J’espère que tu n’as pas l’intention de t’habiller comme ça pour aller à la fête de l’école demain ! », ajoute Magali en pouffant de rire. « Mmmmmuhh mmm ! », répond Camille. « Qu’est-ce que tu dis ? On ne comprend rien ». Camille ôte prudemment les deux écharpes qui lui protègent le cou et découvre une toute petite partie de sa bouche. « Je dis que si vous avez envie d’être malades, c’est votre problème ! » dit-elle avant de se recouvrir à la hâte.

Soudain, une salve de boules de neige lancées par Thomas et ses amis, atteint lâchement les trois petites filles. Sandrine et Magali ne se font pas prier et ripostent dans la bonne humeur. Camille essaye tant bien que mal d’éviter les boules qui continuent d’arriver dans sa direction mais, avec tous ces vêtements sur le corps, elle a perdu toute liberté de mouvement. Touchée en plein visage, elle tombe et ne parvient plus à se relever. Elle hurle des sons incompréhensibles. Les autres enfants, trop occupés à rire et à se lancer des boules de neige, ne lui portent pas la moindre attention.

Camille gigote tellement qu’elle finit par rouler sur elle-même. Elle prend de la vitesse et dévale la pente au milieu des luges qui tentent de l’éviter. Thomas remarque sa sœur et se met à courir à toute vitesse derrière elle pour la rattraper. Il y parvient, juste avant qu’elle ne se cogne contre un arbre. Thomas aide Camille à se relever mais, au lieu de le remercier, elle se met en colère. « Ah c’est malin ! Avec vos jeux stupides, vous avez bien failli me tuer ! ». Elle est vraiment très fâchée. Elle se débarrasse de la neige qui lui colle aux vêtements et retourne vers la maison.

Mais avec tous ces vêtements sur le dos, impossible de marcher ! Thomas, se sentant un peu coupable, propose à Camille de s’asseoir sur son traîneau et de se laisser tirer vers la maison. Camille refuse l’aide de son frère. Elle enlève ses bottes et quelques couches de vêtements puis remonte la pente, pieds nus, avant de disparaître en claquant la porte de la maison. Sa maman, l’apercevant sans chaussures ni chaussettes, se fâche et l’envoie dans sa chambre. « Quelle journée pourrie ! », se dit Camille, recroquevillée sur ses genoux dans un bain fumant. « Il ne manquerait plus que… AAAH… ATCHOUM ! ».

Ça y est ! Ce qu’elle redoutait le plus : Camille a attrapé un rhume ! La petite fille se met à pleurer toutes les larmes de son corps. « Allons, allons, ce n’est tout de même pas si grave », lui dit sa maman, accourue dans la salle de bain. « Je ne voulais pas me fâcher comme ça avec toi mais avoue que courir à pieds nus dans la neige, ce n’était pas très malin ! », ajoute-t-elle en caressant les jolis cheveux de sa fille. « Ce n’est pas pour ça que je pleure », lui répond Camille. « C’est parce qu’avec ce stupide rhume, je n’ai aucune chance de gagner le concours de Princesse à l’école ».

Le lendemain, Camille refuse de se rendre à la fête. Elle demeure figée dans son lit, avec un vrai mal à la tête cette fois. Son nez est tout rouge et ses yeux ressemblent plus à ceux d’un crapaud qu’à ceux d’une princesse. Quel triste spectacle ! Puisque maman ne réussit pas à la convaincre de sortir de son lit, c’est papa qui est chargé de cette délicate mission. Avec lui, cela marche toujours. L’âme en peine, dans ses beaux habits de cérémonie, elle monte finalement dans la voiture de son papa qui parvient à lui décrocher un véritable sourire. A ses côtés, Thomas n’arrête pas d’éternuer.

Arrivée dans la grande salle des fêtes, Camille tente maladroitement de retarder le moment où elle devra se présenter sur l’estrade. Son papa l’accompagne jusqu’à l’escalier et lui murmure quelques gentilles paroles à l’oreille. Mais quelle surprise pour Camille qui parvient finalement à présenter un de ses plus beaux sourires à l’assemblée ! Toutes les participantes au concours de Princesse sont enrhumées. Et toutes ont l’air plus mal en point les unes que les autres. Bien plus que Camille en tous les cas ! Magali et Sandrine sont là aussi mais elles ne cessent de se moucher et d’éternuer.

Le jury composé de tous les papas est unanime : Camille est décidemment la plus jolie et… la moins enrhumée de toutes les participantes. Sous les applaudissements de tous, elle vient chercher sa couronne de diamants. C’est le directeur de l’école qui la lui pose sur la tête. La tradition veut que la gagnante embrasse chacun des membres du jury mais, craignant d’attraper le rhume de la lauréate, ils reculent tous et se contentent d’une poignée de main. Tous sauf le papa de Camille ! Fier de sa fille, il la prend dans ses bras et l’invite à ouvrir le bal devant un parterre de gens enrhumés.

« Finalement, vous aviez raison de vous moquer de moi », dit Camille à ses amies Sandrine et Magali, couvertes d’une impressionnante couche de vêtements. « Ces accoutrements sont vraiment ridicules ». A peine vêtue d’un châle, elle monte dans la voiture de son papa qui lui tient la porte ouverte comme le plus galant des princes.

Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Princesse Lecture (Janvier-Février 2006 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

"Le merveilleux rêve d’Helena"

La nuit vient de tomber. Helena s’est endormie sur le bureau en écrivant une lettre à son Prince charmant imaginaire. Mais quel est donc ce bruit qui dérange le sommeil de la petite fille ? Helena ouvre les yeux et aperçoit deux minuscules souris qui se disputent sa lettre. La petite fille sursaute, prête à hurler. « Rassurez-vous Helena, nous ne vous voulons aucun mal », dit l’une d’elles.

« Comment, mais…vous parlez ? », dit Helena, surprise. « Bien sûr que nous parlons !», répondent en cœur les deux souris, « Et nous pouvons lire aussi », ajoutent-elles. Helena fait mine de reprendre sa lettre, très embarrassée à l’idée que deux souris, si petites soient-elles, découvrent ses secrets. « Cela vous plairait de le rencontrer pour de vrai, votre Prince charmant ? », demande l’une des souris.

Helena pense que les souris se moquent d’elle. « Nous pouvons vous conduire jusqu’à lui », ajoute la deuxième souris. « Il vous suffit de nous toucher le bout du nez, à chacune, en même temps ! ». Helena hésite quelques instants puis elle pose deux doigts sur le museau des souris. Un éclair jaillit dans la pièce qui se remplit d’étoiles. La chaise se met à tourbillonner et transporte Helena dans le ciel.

Après un court voyage parmi les étoiles, Helena se retrouve parée d’une superbe robe de soie blanche et d’une couronne de diamants. Face à elle se dresse un château digne des plus beaux contes de fée. Elle traverse lentement un champ de fleurs qui s’écartent sur son passage et lui sourient. C’est alors que, descendant de son cheval, surgit le Prince charmant, aussi beau que dans ses rêves.

« Je vous rencontre enfin », dit le Prince en s’agenouillant devant sa Princesse. Il lui prend délicatement la main et l’embrasse du bout des lèvres. « Ces merveilleuses lettres que vous m’écrivez, je les garde toutes près de mon cœur ». A ces mots, Helena rougit. « Est-ce possible ? », se dit-elle, cherchant à fuir le regard du Prince. « Accompagnez-moi au château, je vous en supplie ! », dit le Prince.

Helena se laisse emmener et découvre mille merveilles. Le château est tel qu’elle l’a toujours imaginé : superbement décoré et majestueux ! Elle s’y balade au bras du Prince et tout le monde la salue comme si on la connaissait depuis toujours. Dans la soirée, une grande réception est organisée en son honneur. Helena prend place à côté du Prince qui ne la quitte pas des yeux.

Le père du Prince, en bout de table, se lève et porte un toast à la Princesse Helena. « Qu’en ce jour de mariage de mon fils et de la Princesse Helena, le soleil brille dans le ciel comme il brille dans nos cœurs », dit-il. Tous les invités au festin se lèvent pour célébrer la nouvelle. Helena n’a pas bougé. Elle écarquille grand les yeux, surprise par l’annonce de son mariage avec le Prince.

« Me marier, mais… j’ai à peine neuf ans ! », dit soudain Helena en se réveillant. Elle a retrouvé sa chambre. « Que racontes-tu donc, ma chérie ? », lui demande son papa venu vérifier si elle dormait. Helena cache vite sa lettre au Prince « Oh rien ! », dit-elle. « J’ai dû faire un rêve, un merveilleux rêve ! », ajoute-t-elle, tout bas, en se laissant soulever par son papa.

Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Princesse Lecture (Janvier-Février 2006 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

La sorcière Chapada dans "Chapada découvre le monde des sorciers"

Chapada est une jeune fille moderne, en tous points semblables à ses camarades de classe. Seulement voilà, Chapada a un secret : c’est une petite sorcière ! Elle a découvert ses étranges pouvoirs ce matin même. Elle jouait avec Moustache, le chat du voisin, quand subitement, elle l’a entendu distinctement lui parler. Elle a d’abord cru à une mauvaise plaisanterie du voisin, particulièrement doué pour faire le ventriloque. Mais elle a rapidement compris que le voisin n’y était pour rien. La maman de Chapada, qui observait sa fille depuis la fenêtre de sa cuisine, redoutait le jour où elle découvrirait qu’elle était une sorcière. Elle-même en était une, comme sa mère avant elle, et toutes les générations de femmes de sa famille.

Chapada était encore sous le choc de cette révélation. « Il y a plus de sorciers et de sorcières dans le monde moderne que tu ne le crois », lui dit sa maman. « A partir de maintenant, tu risques d’en rencontrer beaucoup sur ta route. Et tu vas devoir être très prudente. Certains sont gentils, comme nous, mais d’autres sont très méchants ». « Mais comment est-ce que je les reconnaîtrai ? », demanda Chapada visiblement très inquiète. « Tu les reconnaîtras ma chérie », lui dit sa maman. « Regarde-moi et dis-moi ce que tu vois ! », ajouta-t-elle en reculant de quelques pas. Chapada fixa sa maman un long moment et, à sa grande surprise, elle la vit se transformer en sorcière comme on en voyait tant dans les livres d’histoires.

Le jour suivant, Chapada n’osait pas sortir de sa chambre. Son père frappa plusieurs fois à sa porte car il devait l’emmener à l’école. Mais Chapada ne répondait pas. Il se décida finalement à entrer et vit Chapada, assise sur son lit, immobile, le cartable sur les genoux. « Que t’arrive-t-il donc Chapada ? », demanda-t-il. « Tu ne te sens pas bien ? ». La petite sorcière ne dit rien. Elle se contenta de fixer son père un long moment pour voir si lui aussi était un sorcier. La maman de Chapada entra dans la chambre, un peu amusée. « Non Chapada, dans cette maison, il n’y a que toi et moi », dit-elle. « Mais, surtout, chut ! C’est notre secret ». Elle sourit à sa fille et l’embrassa sur la joue. « Mais de quoi est-ce que vous parlez ? », demanda le père.

Cette journée à l’école était l’occasion pour Chapada de voir si, parmi ses amies, il y a avait d’autres petites sorcières. Elle demeura silencieuse et fixait avec insistance les enfants un à un. « Vous me semblez très distraite aujourd’hui », lui dit soudain Madame Bermuzine, le professeur d’histoire. A cette remarque, Chapada sortit de ses songes et s’excusa. C’est alors qu’elle remarqua que Madame Bermuzine lui souriait étrangement. « Bienvenue parmi nous ! », lui dit-elle en s’avançant vers la jeune fille. A chacun de ses pas, Bermuzine se transformait en sorcière. Mais son habit ne ressemblait pas à celui de la maman de Chapada. Il était sale et pleins de trous. Cela voulait-il dire que Madame Bermuzine était une méchante sorcière ?

Chapada se posa cette question toute la journée. Bien entendu, elle n’osa pas le demander directement à Madame Bermuzine. Alors qu’elle se lavait les mains dans les toilettes de l’école, juste avant de rentrer en cours, Chapada fut surprise par l’intrusion de la Directrice. « Et bien Mademoiselle ? Vous n’êtes pas en classe ? La cloche ne va pas tarder à sonner », lui dit-elle d’une voix autoritaire. Chapada se sécha vite les mains. Elle ne put s’empêcher de lâcher un petit cri lorsqu’elle croisa le reflet de la Directrice dans le miroir. Un reflet de sorcière à l’habit effrayant avec un chapeau d’où plusieurs serpents s’échappaient en sifflant. Chapada sortit vite des toilettes pour rejoindre sa classe. Au passage, elle bouscula Madame Bermuzine.

Au cours de cette longue semaine d’école, Chapada découvrit en effet que le monde était peuplé de nombreux sorciers et sorcières. Exactement comme le lui avait dit sa maman. Mais, à ce jour, il lui était impossible de distinguer les gentils des méchants. Sa maman lui dit : « Tant qu’il n’a rien fait de méchant, on ne peut pas distinguer un bon sorcier d’un mauvais. Et ne te laisse pas influencer par l’habit. Cela ne veut absolument rien dire. » Chapada se demandait aussi pourquoi aucune de ses camarades de classe n’était une sorcière. « Tous les sorciers que j’ai rencontrés sont des adultes », dit-elle. « Tu ne peux pas voir une sorcière qui ne s’est pas découverte elle-même », répondit la maman de Chapada. « Tu risques d’être surprise dans les jours qui viennent ».

Et en effet, la surprise fut au rendez-vous le lundi matin. Caroline, la meilleure amie de Bermuzine n’était pas en classe au moment où le cours de français débutait. Elle arriva en retard, toute essoufflée. Elle se dirigea avec son lourd cartable à son banc, juste à côté de Chapada. Au moment de s’asseoir, elle laissa échapper un petit cri. Chapada la fixa et toutes deux se mirent à crier au même moment. « Chapada, toi aussi, c’est affreux ! », dit Caroline. « Allons, allons, mesdemoiselles, un peu de tenue je vous prie », interrompit le professeur de français. Chapada et Caroline découvrirent au même moment que le professeur de français était une sorcière elle aussi. « Nous discuterons de tout cela plus tard si vous le souhaitez », leur dit-elle à voix basse.

Dans la cour de récréation, Caroline et Chapada s’amusèrent à deviner qui, parmi les autres enfants de l’école, pouvaient être des sorciers. « Certainement pas lui », dit Caroline, désignant Arnaud, un garçon plutôt timide et maladroit. « Et elle, qu’en penses-tu ? », demanda Caroline en désignant Elisabeth, une fille prétentieuse. « Je ne sais pas », répondit Chapada. « Mais si c’en est une, c’est certainement une méchante !» A ces mots, comme si Elisabeth les avait entendues, elle tourna le visage vers elles et murmura quelque chose entre ses dents. Chapada et Caroline virent les mots sortir de la bouche de la jeune fille et venir tourner autour de leurs têtes. Subitement, ils se mirent à tourner de plus en plus vite avant de s’engouffrer dans la bouche de Caroline.

De retour à la maison, Chapada se précipita dans la cuisine. Elle raconta à sa maman tout ce qui s’était passé à l’école. Elle décrivit dans les détails l’épisode des mots sortis de la bouche d’Elisabeth. « Mon Dieu », dit la maman de la petite sorcière. « Est-ce qu’elle est parvenue à les recracher au moins ? », demanda-t-elle, très inquiète. « Non ! », dit Chapada. « Je crois même qu’elle les a avalés ». A ces mots, la maman de Chapada défit son tablier et abandonna immédiatement sa cuisine. « Conduis-moi chez ton amie ! », dit-elle. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, Chapada et sa mère sortirent de la maison, bousculant au passage le père de Chapada. « Et où allez-vous comme ça ? », hurla-t-il en les regardant s’éloigner.

Il fallut très peu de temps à Chapada et sa mère pour arriver chez Caroline. Les portes de la maison étaient fermées et, plus étrange encore, les volets aussi. Il régnait dans le voisinage, une étrange atmosphère, comme si l’air s’était subitement rafraîchi. « Pourvu qu’il ne soit pas trop tard !», dit la maman. « Ecoute-moi bien Chapada, ce que tu vas voir dans cette maison risque de te marquer à jamais. Toi seule peux sortir ton amie du sortilège qui lui a été lancé. Car tu étais à côté d’elle quand cela s’est produit. Oublie que Caroline est ton amie pour quelques instants car tu vas devoir l’affronter comme une ennemie si tu veux la sauver. Si tu échoues, ton amie sera une méchante sorcière à jamais ! ».

Chapada s’avança à pas de loups vers la maison de son amie. Elle jeta un dernier regard, inquiet, à sa maman, puis gravit un à un les marches qui menaient vers la porte d’entrée. Des bruits assourdissants accompagnaient chacun de ses pas. Elle se boucha les oreilles mais comprit rapidement qu’elle devait surmonter tous les obstacles si elle voulait sauver Caroline. De sa voix la plus douce, elle se mit à chanter la plus jolie des chansons qu’elle connaissait. Les bruits cessèrent immédiatement. Elle entreprit alors d’ouvrir la porte qui, comme elle s’en doutait, lui résista fortement. Chapada réfléchit quelques instants et dit : « Puisque tu ne veux pas me laisser entrer, je vais te peindre en rose, la couleur de l’amour ! ». La porte s’ouvrit brusquement.

L’intérieur de la maison était plongé dans l’obscurité la plus totale. Chapada n’y voyait pas grand-chose. Elle alluma l’interrupteur qui lui envoya une petite décharge électrique. Mais toujours pas de lumière ! Elle ferma alors les yeux et inspira profondément avant de relâcher l’air de toutes ses forces. Son souffle se transforma en lumière blanche jaillissant dans chaque recoin de la maison. Elle découvrit des traces de lutte : des chaises renversées, des verres cassés,… Mais aucune trace de Caroline, ni de qui que ce soit d’autre d’ailleurs. Soudain, un gémissement attira l’attention de la petite sorcière. Chapada s’avança doucement dans le salon où elle découvrit la maman de Caroline, attachée à une chaise. Face à elle, trônait un chat noir à l’air menaçant.

Chapada savait généralement comment s’y prendre avec les chats. Mais celui-là n’avait rien d’un chat ordinaire. Il n’arrêtait pas de souffler, de miauler et de gigoter sur ses pattes arrière, comme s’il cherchait à impressionner la maman de Caroline. Lorsqu’il aperçut Chapada, il souffla si fort dans sa direction qu’elle en tomba à la renverse. Chapada parvint à se relever et s’avança vers le chat qui soufflait de plus en plus fort. Son souffle était si puissant que tous les meubles de la pièce se mirent à bouger. Mais Chapada tenait bon, elle marchait dans sa direction comme si elle affrontait le vent. Voyant que Chapada était trop forte pour lui, le chat cessa de souffler. A la place il fit sortir de sa bouche des milliers de mots.

Chapada ferma aussitôt la bouche, rapidement imitée par la maman de Caroline. Les mots sortaient de plus en plus nombreux. Chapada les observait du mieux qu’elle pouvait. Elle les voyait tourner autour d’elle, de plus en plus vite, de plus en plus menaçants. Dans un effort de concentration extraordinaire, elle parvint enfin à ralentir leur manège pour finalement les immobiliser complètement. Elle fixa alors le chat. Un mot était resté bloqué dans sa gorge, il suffoquait. Chapada le délivra en lisant à voix haute l’étrange mot qui explosa comme une bulle de savon. Elle fit pareil avec tous les autres mots qui, un à un, éclatèrent. La maman de Caroline aida Chapada dans cette entreprise et, en moins de dix minutes, les mots avaient tous disparus.

La maman de Caroline remercia Chapada de l’avoir délivrée. « Mais il te reste maintenant à délivrer Caroline », lui dit-elle en désignant le chat. Surprise, Chapada regarda le chat noir qui gisait, épuisé, au pied du fauteuil. Elle s’approcha de lui pour tenter de le caresser. Mais le chat tenta de la griffer. Il était épuisé, certes, mais toujours agressif. Que fallait-il faire pour que Caroline redevienne comme avant ? Personne ne le savait ! Seule Chapada, comme le lui avait dit sa maman, détenait le secret de la délivrance. Elle demeura longtemps songeuse face au chat qui se laissait maintenant caresser. Après un temps, elle le regarda fixement dans les yeux et dit simplement, de sa voix la plus douce : « Caroline, tu me manques ! ».

A ces mots, comme par enchantement, Caroline reprit la forme de la gentille petite fille qu’elle avait toujours été. Elle se jeta dans les bras de Chapada, sa meilleure amie pour la vie. La maman de Chapada félicita sa fille. « Bravo Chapada », lui dit-elle. « Mais comment as-tu fait pour la délivrer du mauvais sort ? ». « En restant moi-même ! », répondit Chapada. « Une petite fille comme toutes les autres ! ».


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Lili la sorcière dans "Des espions à Makraville"

Après un long et rugueux hiver, le printemps est enfin de retour à Makraville. Et comme chaque année à pareille époque, l’école des sorcières s’apprête à recevoir de nombreux visiteurs lors de sa très attendue Journée Portes Ouvertes. Lili et ses camarades ont reçu des instructions très précises : pas de sorcellerie en dehors des présentations officielles. Côté professeurs, chacun a pour mission d’ouvrir l’œil. Car il paraît que cette année, des espions ont l’intention de venir à Makraville. Lorsqu’elle apprend cette nouvelle, Lili décide de mener sa petite enquête.

Dans le laboratoire, Annabelle impressionne les plus petits avec ses tours merveilleux. Elle fait pousser des plantes aux feuilles de toutes les formes et de toutes les couleurs. « C’est tout ce que vous faites dans cette école ? », dit une dame à l’air méchant. « Des tours pour amuser les enfants ! ». Lili, alertée par cette remarque, s’approche de la dame et dit : « Oui Madame, c’est tout ce qu’on nous apprend à Makraville ». « Il y a des espions dans l’école », dit Lili, tout bas, à son amie Annabelle. « Il vaut mieux que nous n’en disions pas trop sur ce que nous sommes capables de faire ».

« Des espions ! », s’exclame Annabelle. « Mais alors… cet homme, tout à l’heure qui m’a demandé où se trouvait la bibliothèque… ». Lili et Annabelle quittent précipitamment le laboratoire. Elles parcourent les couloirs de l’école à toute vitesse. Arrivées devant la porte de la bibliothèque, les deux petites sorcières constatent les dégâts : des vitres ont été brisées et certaines pages de livres ont été arrachées. Mais aucune trace des deux espions ! « Tu ne crois pas que nous devrions prévenir la directrice ? », dit alors Annabelle.

Mais la directrice de l’école est très occupée. Elle raconte l’histoire de Makraville à un groupe de parents visiblement impressionnés. Lili et Annabelle n’osent pas l’interrompre. C’est alors que Lili aperçoit, au loin, la dame au regard méchant. Elle sort du bureau de la directrice avec, sous son bras, un gros grimoire contenant tous les secrets de Makraville. Lili décide de la suivre mais la dame se précipite sur un balai et s’envole dans les airs. La courageuse petite sorcière enfourche elle aussi son balai sous les yeux des visiteurs de l’école enchantés par ce spectacle improvisé.

Dans les airs, le second espion tente de faire vaciller Lili à plusieurs reprises. Heureusement, Lili résiste à tous les assauts. Au prix d’une pirouette digne des plus grandes acrobates, elle arrache le grimoire des mains de la méchante dame. Elle le lance à son amie Annabelle qui le rattrape avant qu’il ne touche le sol. Rageurs, les deux espions abandonnent leur butin. Lili est acclamée par les visiteurs qui n’ont pas perdu une miette du spectacle. Annabelle tend le grimoire à la directrice. Lili et son amie viennent de sauver plus de deux mille ans de secrets de sorcellerie !


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Eugénie la sorcière dans "Eugénie invente le ski"

Eugénie la sorcière a décidé d’aller passer quelques jours en montagne. Son fidèle assistant, Jérémy Abricot, l’accompagne car il faut bien que quelqu’un porte les bagages ! Croulant sous le poids des malles trop lourdes, Jérémy demande : « Vous n’aviez pas inventé un moyen de transporter vos caisses et vos chaudrons l’année dernière ? ». Eugénie, sur son balai, préfère ignorer son assistant. Elle scrute le ciel trop bleu à son goût, feuillette son grimoire et ZamTaTam ! Elle fait tomber la neige.

Jérémy se serait bien passé de ce changement de météo. Il n’est pas équipé pour l’hiver et grelotte de froid. Quant à Eugénie, elle est déjà bien au chaud dans son chalet. Elle se prépare une tisane et se met au travail. Car elle n’est pas venue jusqu’ici pour passer des vacances. Elle effectue de savants mélanges d’épices et d’extraits aux odeurs nauséabondes qui font fuir son fidèle chat noir. Quelques croquis au tableau et le tour est joué ! Il est temps d’expérimenter sa nouvelle invention.

Arrivé au chalet, Jérémy s’effondre dans un fauteuil qui a l’air bien confortable. Eugénie transforme le fauteuil en nid de serpents. « Buvez ça ! », dit-elle à son assistant qui ingurgite le breuvage sans rechigner. C’est chaud, très chaud ! Des flammes s’échappent du nez et des oreilles de Jérémy. Il sort en hurlant et se roule dans la neige. Lorsqu’il se remet debout, il remarque que deux des serpents noirs se sont accrochés à ses pieds. Eugénie réfléchit un instant, elle vient d’avoir une idée !

Avec sa baguette de sorcière, Eugénie foudroie les deux serpents qui se raidissent et s’allongent. Jérémy est très inquiet. Dos à la montagne, chaussé de ces deux énormes lattes, il dévale la pente comme il peut. Il se cogne aux sapins et tombe à chaque nouvel obstacle, se faisant très mal. Eugénie observe attentivement la descente infernale de son assistant. Elle lui reproche de s’amuser pendant qu’elle travaille. En bas de la montagne, Jérémy s’écroule dans la neige.

Mais soudain, les deux serpents reviennent à eux. Jérémy remonte la pente à toute vitesse car les reptiles le poursuivent. Au chalet, Eugénie accueille son assistant en transformant directement ses pieds en chasse neige. « C’est trop lourd ! », se plaint Jérémy qui ne parvient même plus à soulever ses pieds. Mais la vue du chat noir d’Eugénie, subitement transformé en panthère affamée, décuple les forces de Jérémy. Il sort et dévale à nouveau la montagne à toute vitesse, déblayant la neige sur son passage.

« Mais quel intérêt ? », se demande Eugénie. « Rien de tel qu’un bon dégel ! ». Sous l’effet des formules magiques d’Eugénie, des torrents de pluie se mettent à tomber. La neige fond et transforme la montagne en chemin de boue dans laquelle Jérémy a bien du mal à se dépêtrer. La sorcière, sur son balai, a décidé de rentrer. « La montagne ne m’inspire pas cette année », dit-elle à son assistant. Et hop ! Elle disparaît sur son balai, laissant le pauvre Jérémy dans la boue, en compagnie des serpents.


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Sorcière lecture (N°2 - Janvier-Février 2006 édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

Lili la sorcière dans "Lili et les lutins maléfiques"

C’est la rentrée à Makraville. Après quinze jours de vacances bien méritées, les petites sorcières sont de retour à l’école. Lili et Annabelle sont très heureuses de se revoir. Depuis l’histoire du parfum magique, elles sont devenues les meilleures amies du monde. Mais où reste donc la directrice de l’école ? D’habitude, elle est toujours la première pour accueillir les apprenties sorcières. Les professeurs rassemblés dans le hall s’inquiètent. Lui serait-il arrivé quelque chose ?

L’heure tourne ! Le professeur de sorcellerie disperse les élèves et désigne Annabelle pour donner cours en son absence. Car il a décidé de partir à la recherche de la directrice. Lili, de son côté, sort du rang pour mener sa petite enquête. Après tout, c’est elle la dernière qui a vu la directrice avant les vacances. Elle se dirige immédiatement dans son bureau dont la porte claque étrangement. Elle y pénètre et découvre un désordre inhabituel. La fenêtre du bureau est ouverte sur la sombre forêt.

« Que faites-vous ici, Mademoiselle ?», demande le professeur de sorcellerie. Lili sursaute mais n’a pas le temps de répondre car le professeur s’écroule à ses pieds. Une mini flèche l’a atteint dans la nuque : du poison certainement ! Lili évite de justesse une autre salve de minis flèches tirées par un groupe de lutins maléfiques. Il y en a des centaines, dissimulés dans les moindres recoins du bureau. « Bara Esdero Trim ! », lance Lili qui parvient rapidement à immobiliser les petits êtres.

Lili aperçoit le grimoire de la directrice. « Elle faisait des expériences sur les fleurs crachées par le monstre à cinq têtes», se dit la petite sorcière. Lili prend une de ces fleurs sur la table et prononce les mots du grimoire. Aussitôt la fleur se change en lutin belliqueux que Lili a bien du mal à contrôler. D’un coup de baguette magique, elle le ficelle et commence à l’interroger. Le lutin refuse de lui parler mais Lili fait des miracles avec sa formule de vérité : « Berzam Der Berzam Daraha ! ».

Vite, il n’y a pas une minute à perdre ! Lili enfourche son balai et s’élance par la fenêtre. Elle a tôt fait de trouver le repère des lutins dans la forêt. Ils se sont rassemblés autour de la directrice qu’ils ont ligotée à un arbre. Des minis flèches se plantent dans le balai de Lili mais, heureusement, aucune ne l’atteint elle. La petite sorcière s’approche et c’est la panique parmi les lutins. Ils se bouchent les oreilles pour ne pas entendre la formule qui les fige. « Bara Esdero Trim ! ».

Lili parvient rapidement à délivrer la directrice. Celle-ci, fière de sa meilleure élève, lui emprunte sa baguette magique et, d’un éclair fulgurant, elle transforme les lutins en jolies fleurs colorées. « C’est mieux ainsi », dit-elle. « Mais au fait, que faisais-tu là ? Je m’attendais plutôt à voir arriver ton professeur de sorcellerie ». De retour à l’école, la directrice et Lili aperçoivent le professeur allongé à terre dans le bureau. Elles ne peuvent s’empêcher de rire tant il ronfle bruyamment.


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Eugénie la sorcière dans "Eugénie invente la machine à café"

Eugénie la sorcière s’est levée du bon pied. Comme cela lui arrive pratiquement chaque matin, elle a une idée ! Cependant, pour la mettre en pratique, il lui faut l’aide de son fidèle mais stupide apprenti : Jérémie Abricot ! Grâce à ses pouvoirs de sorcière, Eugénie interrompt le sommeil du jeune homme. Elle lui jette un sort et Jérémie commence à faire des cauchemars qui le font bondir hors de son lit.

« Ah, ça tombe bien que vous soyez réveillé », lui dit-elle, innocemment. « Je viens d’avoir une idée qui va changer la face du monde ». Jérémie enfile tant bien que mal son pantalon, suivant docilement la sorcière jusque dans son laboratoire. Il siffle d’admiration, impressionné par l’endroit et entreprend de toucher à tout, ce qui énerve fortement Eugénie. Elle fait tomber un flacon sur sa tête et Jérémie hurle de douleur en se tenant le haut du crâne.

« Mais, mais… qu’est-ce que c’est que ça ? », demande l’apprenti, inquiet, face à une immense fusée. De sa baguette magique, Eugénie transforme son assistant en cosmonaute. Elle lui désigne une échelle qui mène au sommet de l’engin. « Montez là-dedans », lui dit-elle sans sommation. Jérémie fait mine de refuser mais lorsque la sorcière transforme son chat noir en fauve féroce, il n’a d’autre choix que de se hisser au sommet de la drôle de machine.

Eugénie a fait disparaître l’échelle et voilà Jérémie suspendu dans le vide. Il escalade les derniers centimètres et découvre l’intérieur de l’engin. « Dites, il y a une drôle d’odeur ici !», se plaint-il en reniflant à plein nez. Eugénie met le feu sous la marmite. D’immenses tuyaux de verre s’emplissent d’un liquide sombre. « Quand vous serez là haut, pensez à dire un truc intelligent, pour la postérité !», hurle Eugénie, s’éloignant de l’engin en ébullition.

« Là haut où ? » demande Jérémie, regardant par le hublot. La machine s’emballe et le visage du jeune homme est déformé par les secousses. Il hurle. BOUM ! Après une énorme explosion, Jérémie apparaît en toussant derrière une fumée épaisse. Eugénie, mains sur les hanches, gronde son assistant lorsqu’il s’évanouit à ses pieds. Elle observe le liquide qui s’échappe des tuyaux en verre et renifle la bonne odeur qui s’en dégage. Un large sourire illumine son visage.

Eugénie et sa cousine LiLi dégustent de petits biscuits secs, allongées sur les chaises longues du jardin. « Et comment dis-tu que s’appelle ce délicieux breuvage ? » demande la cousine. « Du café ! » répond simplement Eugénie, portant à ses lèvres une petite tasse de porcelaine. « Excellent ! », reprend Lili. « Oui, mais il faudra que je trouve un moyen moins bruyant de le fabriquer » ajoute Eugénie. Toutes deux éclatent de rire en regardant Jérémie se débattre derrière le hublot.


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Lili la sorcière dans "Lili et le parfum magique"

Lili la sorcière adore rester seule dans la bibliothèque de l’école de Makraville. Elle passe des heures entières, à la lueur des bougies, en compagnie des livres, ses seuls véritables amis. Elle se sent bien dans cette ambiance magique et mystérieuse. Lili apprécie le calme et la solitude, loin de ses camarades de classe qui se moquent tout le temps d’elle. Annabelle, la plus vilaine et la plus méchante de toutes, passe d’ailleurs son temps à épier sa rivale. Elle est très jalouse car les professeurs considèrent Lili comme la plus gentille et la plus douée de l’école des apprenties sorcières.

Une nuit, alors que Lili révise ses formules magiques, une chose incroyable se produit. Un énorme livre de la section des ouvrages interdits se met à briller de mille feux. Lili, concentrée sur sa lecture, ne le remarque même pas. Mais voilà que dans un éclair prodigieux, l’ouvrage brise la vitre qui le retient enfermé et atterrit sur le bureau de la petite sorcière ! Annabelle, cachée sous une table, n’a pas perdu une miette de ce spectacle extraordinaire. Lili, toute excitée, ouvre l’énorme volume. Des tourbillons de poussière volent dans les airs jusqu’à Annabelle qui doit se retenir d’éternuer.

L’ouvrage est écrit dans une langue inconnue de tous. Mais Lili, elle, réussit à déchiffrer les drôles d’écritures. Dès qu’elle se met à lire à voix haute, les murs de la bibliothèque tremblent bruyamment. Annabelle, sous la table, a vraiment très peur. Soudain, une bouche se dessine sur les pages du livre et, d’une voix grave, s’échappent d’étranges paroles : « Les effluves du parfum magique guideront tes pas. Mais prends garde ! Eloigne-toi des flammes de l’enfer !». A ces mots, un nouvel éclair jaillit, et le livre reprend place dans la bibliothèque, comme si rien ne s’était produit.

Le lendemain, après le cours d’astrologie, Lili se rue chez la directrice de l’école. Annabelle, qui n’a pas dormi de la nuit, a vraiment mauvaise mine. Elle suit Lili et, munie de sa couverture invisible, pénètre dans le bureau de la directrice sans se faire remarquer. Lili raconte dans les moindres détails ce qui s’est produit. « Et bien ma chère Lili », lui dit la directrice, « il semble que tu aies été choisie pour une grande mission. Tu as de la chance ! Ce genre d’événement n’arrive qu’une fois tous les sept cent ans. Vas, et trouve le parfum magique. Profite des vacances mais sois très prudente ! ».

Les apprenties sorcières quittent l’école pour quelques jours de vacances. Lili, elle, se prépare pour une aventure bien plus excitante ! Munie de son chapeau, de son balai et d’un petit baluchon, elle s’apprête à traverser la forêt interdite, unique passage pour sortir du domaine de l’école. Elle l’a déjà survolée des centaines de fois mais, pour avoir une chance de mettre la main sur le parfum, il va falloir l’explorer de fond en comble. Du haut de son bureau, la directrice regarde Lili s’éloigner. Elle aperçoit aussi Annabelle qui a décidé de suivre Lili pour lui voler le parfum magique.

Dès que Lili pénètre dans la forêt, le ciel s’assombrit. Des éclairs déchirent le ciel ; la pluie ne va pas tarder. Annabelle suit Lili à distance. Dans la précipitation, elle n’a pris aucun bagage avec elle, même pas son chapeau. Voilà la pluie ! Un véritable déluge s’abat sur la forêt et Annabelle s’est laissé surprendre. Aucune de ses formules magiques ne calme la pluie. Elle est toute dégoulinante et s’abrite sous un arbre. Lili, quant à elle, utilise ses pouvoirs. Elle demande à une horde de chauves-souris de déployer leurs ailes au-dessus de sa tête pour former un immense parapluie.

Lili sait voler sur un balai, parler aux animaux, concocter des potions magiques et lire dans les étoiles mais elle ignore tout du fameux « parfum magique ». Aucun des milliers d’ouvrages qu’elle a lus n’en parle. Elle se jure d’écrire elle-même le livre de ses aventures dès son retour à l’école. La pluie a cessé. En route ! Lili remercie les chauves-souris et s’enfonce un peu plus dans la forêt marécageuse, aidée par deux serpents qui lui servent de skis nautiques. Annabelle a totalement perdu ses pouvoirs de sorcière. Elle s’enfonce jusqu’aux genoux dans une boue épaisse et visqueuse.

Au pied d’un arbre, tout près d’une rivière, Lili décide de faire une pause. Elle étale le contenu de son sac et se prépare à manger. Annabelle a faim elle aussi. Mais impossible de bouger ! Elle doit se contenter de feuilles d’arbre très indigestes. Lili sort de sa veste le petit carnet dans lequel elle a soigneusement noté les mots du livre de la bibliothèque. Elle les prononce à voix haute et, soudain, l’arbre sur lequel elle s’est appuyée se met à trembler. Une bouche se dessine sur le tronc et, de sa voix grave, lui dit : « Gare à celle qui se trompe de chemin ! ». A ces mots, la bouche disparaît.

Annabelle a pris froid et ne cesse d’éternuer. Elle reste loin de Lili pour éviter de se faire repérer. Au bout d’un sentier, Lili se retrouve face à deux routes allant dans des directions complètement opposées. Au milieu trône un panneau avec deux flèches sans inscription. Lili réfléchit longuement. Elle ferme les yeux, cherchant l’inspiration. Le vent se lève. Une chouette grise aux yeux d’un jaune profond vient se poser sur la flèche de droite. Lili ouvre les yeux et l’aperçoit. « Je me suis toujours méfiée des chouettes », dit-elle tout haut. « Si tu dis que c’est à droite, j’irai donc à gauche ».

Annabelle arrive épuisée au bout du sentier. Elle râle car elle a perdu Lili de vue. Elle aperçoit la chouette perchée entre les deux flèches. « Arrabal et Labarra, chouette, le bon chemin tu m’indiqueras ! », dit-elle avec la plus grande conviction en s’adressant à l’animal. La chouette se pose sur la flèche de droite. « J’ai toujours fait confiance aux chouettes », dit Annabelle, retrouvant le sourire. « Je suivrai donc ton conseil et j’irai à droite ». Elle s’éloigne vers la droite en ricanant. La chouette, désormais seule, dit d’une voix grave : « Gare à celle qui se trompe de chemin ! ».

La route suivie par Lili est très agréable. C’en est fini de la pluie, des éclairs et de la boue. Du haut de la colline, le spectacle qui s’offre à elle est exceptionnel. Des champs de fleurs à perte de vue. Toutes ces couleurs, tous ces parfums ! Elle ferme les yeux et profite des senteurs. Elle sait que le parfum magique se trouve là quelque part, au beau milieu de ces champs. Lili ôte son chapeau, se débarrasse de son baluchon et s’élance à travers champs. Elle danse comme un papillon, virevolte avec les oiseaux. Lili n’est plus seulement une petite sorcière, elle est une fleur parmi les fleurs.

De son côté, Annabelle a vite compris qu’elle a fait fausse route. Couverte de boue de la tête aux pieds, la voilà complètement perdue au milieu d’un champ de ronces. Ses vêtements se déchirent à chacun de ses pas et il fait de plus en plus chaud. Les formules magiques qu’elle prononce n’ont aucun effet. Elle aperçoit des flammes au loin mais elle ne peut faire demi-tour. Les ronces la poussent vers le feu. Un énorme monstre à cinq têtes s’extrait soudain des flammes. Annabelle hurle de toutes ses forces : « LILI, A L’AIDE !». « Gare à celle qui se trompe de chemin », éructe l’horrible monstre.

Allongée dans l’herbe, Lili hume l’air de son petit nez joliment crochu. Les effluves se mélangent, tournoient devant elle. Elle se lève soudain, sans hâte, et marche tout droit au milieu des champs. Sans hésitation, elle s’agenouille devant une fleur grosse comme une citrouille. La fleur s’ouvre, découvrant un flacon en forme de boule de cristal. Lili veut le toucher mais la fleur menace de se refermer. Une bouche se forme dans le cristal : « Suis la goutte, tu sauras ce que tu dois faire ». A ces mots, le flacon s’élève dans les airs, laissant échapper une goutte de parfum couleur arc-en-ciel.

Lili ramasse son chapeau, son baluchon et enfourche son balai. Elle suit la goutte dans sa course effrénée et se retrouve bientôt à la croisée des chemins. Elle évite de justesse la chouette qui s’envole en criant. Lili pilote son balai dans les champs de ronces à perte de vue. Les cris d’Annabelle se font de plus en plus distincts et la chaleur est étouffante. « Blim Astavim », dit Lili en jetant des sorts sur les ronces qui s’écartent sur son passage. La goutte de parfum s’évapore au contact des flammes. Lili la prend dans ses mains pour la protéger et se hâte pour rejoindre Annabelle.

Le monstre à cinq têtes tient Annabelle dans l’une de ses gueules. « Toi aussi tu t’es trompée de chemin ! », dit-il lorsqu’il aperçoit Lili. « Pas du tout !», lui répond-elle en ouvrant les mains. Voyant la goutte, le monstre est pris de panique. Il lâche Annabelle et crache ses flammes en direction de Lili. La petite sorcière prononce les paroles du livre magique : « Merla Zaba Hi Aki Tum ! ». Les flammes s’arrêtent à un mètre d’elle, brûlant seulement les ronces. Lili ouvre les mains et la goutte éclate de milles perles, projetant un arc-en-ciel partout sur son passage, y compris sur le monstre.

L’école des sorcières de Makraville est en fête ! Le monstre arc-en-ciel est l’attraction principale de la rentrée. Il essaye de lancer ses flammes autour de lui, mais ce ne sont que de jolies fleurs qui s’échappent de ses immenses narines. Quant à Lili et Annabelle, les deux nouvelles amies, elles passent leur temps dans la bibliothèque en attente d’une nouvelle mission.



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"Vive le mercredi chez papy"

Comme chaque mercredi, Mathias rend visite à son grand-père. D’habitude, sa petite sœur Emilie l’accompagne mais, cette fois, elle a préféré aller au cinéma avec ses camarades de classe. Mathias adore passer du temps avec son papy, comme il l’appelle affectueusement. Pour lui, ce rendez-vous du mercredi est sacré. Le vieil homme, malgré ses soixante-douze ans, a une santé de fer. Et en plus, il a toujours de super idées pour amuser ses petits-enfants. Mais lorsqu’il ouvre la porte, grand-père est déçu de ne pas voir Emilie. C’est la toute première fois qu’elle ne vient pas un mercredi.

Mathias entre dans la maison comme une furie. Il aperçoit le vieux chat de papy et se met directement à le pourchasser. L’animal, ce vieux sac à puces, comme dit papy, est rusé. Il parvient toujours à échapper à Mathias en se dissimulant sous un lit ou une armoire. Mathias a perdu la trace du petit félin et décide d’abandonner la poursuite. « Tu ne perds rien pour attendre », lui lance-t-il d’un air menaçant. Ensuite, il s’empresse d’aller rejoindre son papy au salon. Mathias trouve son grand-père assis dans un des fauteuils. Et quelle surprise ! Le chat a pris place sur ses genoux.

Mathias oublie bien vite son idée d’ennuyer le chat lorsqu’il remarque la triste mine de son grand-père. « Et bien papy, qu’est-ce qui t’arrive ? », lui demande-t-il. « Rien ! », répond le vieil homme d’une voix caverneuse. « Mais si, je le vois bien, c’est à cause d’Emilie, pas vrai ? ». Le grand-père de Mathias ne répond pas. Il se contente de caresser le chat en regardant fixement le mur devant lui. Ses yeux sont un petit peu mouillés, l’émotion sans doute. Mathias réfléchit en faisant les cent pas dans le salon. « Qu’est-ce qu’on pourrait bien faire ? », se demande-t-il.

« Papy, viens, habille-toi, on sort ! », dit soudain Mathias. Il tire son grand-père par la manche et l’emmène dans le couloir, devant la porte d’entrée. Le vieil homme se laisse faire, comme une marionnette désarticulée. Mathias enfile ses chaussures et sa veste puis aide son papy à mettre son manteau. Il lui visse son chapeau sur la tête, enroule son cou dans une écharpe et s’empare des clefs de la maison. « Où m’emmènes-tu ? », dit finalement le grand-père de Mathias. « J’en ai assez de chasser ton vieux chat ! », lui répond-il simplement. « Aujourd’hui on va à la chasse à Emilie ! ».

Le grand-père n’a même pas le temps de réagir. Il se retrouve dehors, en route vers l’arrêt d’autobus. « Tu te souviens quand tu nous parlais de ton rêve de devenir détective privé ? », demande Mathias à son papy. Assis dans le bus, le vieil homme fronce les sourcils : « Oui je me souviens mais je ne vois pas ce que… Attends, tu veux dire qu’on va… ». Le grand-père ne termine pas sa phrase. Il a compris ! Mathias sourit et le vieil homme retrouve subitement sa bonne humeur. « Tu as raison », dit-il enfin. « On va prouver à ta sœur qu’elle a eu tort de ne pas venir s’amuser avec nous.»

A peine descendus du bus, Mathias et son grand-père pénètrent dans un grand magasin. Ils essayent plein d’accessoires et des vêtements plus comiques les uns que les autres. Papy, dans sa longue veste, chapeau sur la tête, a vraiment le look du détective. Mathias, carnet en main, les cheveux en bataille, joue le rôle du parfait assistant. Avant de sortir du magasin, ils s’achètent chacun une paire de lunettes noires. « L’important, c’est de passer inaperçu ! », dit le grand-père qui s’est pris au jeu. Mathias est ravi d’avoir retrouvé son papy rigolard et enthousiaste, comme au bon vieux temps.

Mathias et son grand-père ne savent pas dans quel cinéma Emilie est entrée. « Elle ne m’a même pas dit le titre du film qu’elle allait voir ! », affirme Mathias. « Ah ah, une affaire compliquée mon cher Mathias !», dit son grand-père. « Le mieux c’est que nous commencions par interroger les gens de tous les cinémas ». Mathias se retourne et aperçoit au moins vingt salles de quartier différentes. Il se gratte la tête et s’apprête à dire quelque chose lorsqu’il se rend compte qu’il est seul au milieu du trottoir. Son grand-père a déjà commencé l’enquête. Mathias le rejoint, carnet en main.

En moins d’un quart d’heure, Mathias et son grand-père ont fait le tour de tous les cinémas du quartier. « Récapitulons, mon cher Mathias », dit le papy en prenant son air le plus sérieux. « La caissière du cinéma Le Roissy a vu un groupe de jeunes filles entrer dans le cinéma d’en face, Le Mandragore, à onze heures vingt ». Mathias acquiesce en relisant ses notes. « Or la caissière du Mandragore, elle, affirme n’avoir vu personne entrer à cette heure-là. Personne en tous cas qui ressemble à Emilie ». Mathias fait non de la tête. « Peut-être n’est-elle pas allée au cinéma», dit Mathias finalement.

« Suis-moi ! », dit soudain le grand-père. Il traverse le boulevard et se pose une nouvelle fois devant la caissière de La Mandragore. « Dites-moi, chère Madame, à quelle heure avez-vous pris votre service ce matin ? », demande le vieil homme. « Et bien, à onze heures cinquante, comme tous les mercredis ! Pourquoi ? ». Mathias et son grand-père échangent un regard complice. « Deux tickets pour La Princesse au cheval rose », dit Mathias. Il tend un billet à la caissière qui hésite : « Tu sais mon garçon, le film a déjà commencé et puis… c’est plutôt pour les filles ». Mathias et son papy insistent.

A l’intérieur de la salle, tout est noir ! Mathias et son grand-père se prennent les pieds dans le tapis. Quelques spectateurs leur demandent de rester tranquille. Mathias enlève ses lunettes de soleil pour y voir un peu plus clair. Son grand-père l’imite et tous deux s’asseyent au fond de la salle. Ils se concentrent quelques instants sur le film et ne peuvent se retenir de rire. Quel film stupide ! Les spectateurs mécontents sont de plus en plus nombreux. Ils foudroient Mathias et son grand-père du regard. « Il faudrait qu’on se rapproche », dit Mathias tout bas. « D’ici, je ne la vois pas ».

Mathias se lève en essayant de ne pas faire de bruit. Mais son siège grince horriblement et il écrase même du pop corn en s’approchant de l’écran. « C’est pas bientôt fini vous deux là ? », hurle une petite fille. Ses camarades se sont levées pour manifester elles aussi leur colère. Emilie est également debout mais elle se contente d’observer sans crier. Mathias la reconnaît tout de suite. Il la désigne du doigt à son grand-père qui attire le jeune garçon hors de la salle. Emilie est restée debout, prise d’un affreux doute. « Oh tu t’assieds ! », lui crie une voix du fond de la salle.

La caissière du cinéma aperçoit Mathias et son grand-père qui sortent de la salle en courant. « Je vous l’avais bien dit que c’était un film pour les filles !», leur crie-t-elle. Mathias est à bout de souffle. « Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? », demande-t-il à son papy ? Le vieil homme désigne un glacier qui se trouve juste en face du cinéma. « On va l’attendre là ! ». Lorsque le film se termine, Emilie et ses camarades passent devant le glacier. Mathias et son grand-père se tortillent pour éviter de se faire remarquer. Emilie s’arrête à leur hauteur, cherchant à comprendre ce qu’ils font.

Les filles ont décidé d’aller faire du shopping. Cela n’a pas l’air d’enchanter Emilie. A vrai dire, elle s’ennuie en compagnie de ses camarades car le shopping, ce n’est vraiment pas son truc ! Mathias s’est caché entre deux rayons de manteaux d’hiver pour l’observer. Son grand-père, quant à lui, fait semblant de s’intéresser aux pyjamas pour dames. « Je peux vous aider Monsieur ? », lui dit soudain une vendeuse. Mathias, craignant d’attirer l’attention d’Emilie, arrive à la rescousse. « Excusez-le, m’dame, il est aveugle, il ne sait pas où il va ». Il emmène son papy vers un autre rayon.

Mais Emilie a repéré son frère et son grand-père. Elle a aussi retrouvé le sourire. En se dissimulant derrière un présentoir rempli de chapeaux, elle fausse compagnie à ses camarades. Mais Mathias et le papy l’ont aussi perdue de vue. C’est elle maintenant qui s’amuse à les épier. Elle les suit entre les rayons du magasin et rit de leur maladresse. Les camarades d’Emilie sortent du magasin. Mathias et son grand-père décident de les suivre. Emilie, pour leur donner une bonne leçon, alerte un responsable de la sécurité. L’homme les arrête et les soumet à une fouille devant les clients du magasin.

De retour sur le boulevard, le grand-père de Mathias a senti que quelqu’un les suivait. « Ne te retourne surtout pas ! », dit-il. Il entraîne son petit-fils dans des quartiers moins fréquentés de la ville. Mathias n’est pas tout à fait rassuré. « Tu es sûr que c’est ici qu’on va retrouver Emilie ? », lui demande-t-il, la voix tremblotante. « Tout à fait sûr ! », répond le grand-père qui attire Mathias dans une ruelle sombre. Il lui met la main devant la bouche pour l’empêcher de parler au moment où Emilie passe devant eux sans les voir. « Bouh ! », lui font-ils en sortant de la ruelle.

Mathias et son grand-père rient de bon cœur. Ils sont contents du tour qu’ils viennent de jouer à Emilie. Emilie met un peu de temps avant de retrouver ses esprits car elle a eu très peur. Mais elle finit par éclater de rire elle aussi. Bras dessus, bras dessous, ils retournent tous les trois à la maison. Il n’y a décidemment rien de tel qu’un mercredi chez papy…


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Moi j'aime la lecture (N°1 Février-Mars 2006 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.

"Une nuit à l’école"

Que se passe-t-il donc à l’école ce matin ? Chaque fois que la maîtresse tourne le dos pour écrire au tableau, les enfants regardent par la fenêtre. On dirait qu’ils attendent quelque chose. « Ca y est, la voilà ! », crie le petit Romain, tout excité. Dans un chahut indescriptible, les enfants montent sur leur banc et commencent à sautiller de joie. Dehors, la neige s’est mise à tomber.

La maîtresse est très contrariée. Elle se fâche sur ses élèves et leur donne à faire un exercice de mathématiques particulièrement difficile. Aucun des enfants n’ose lever la tête vers la fenêtre. Et pourtant la tentation est grande ! Car la neige ne cesse pas de tomber. La maîtresse elle-même semble inquiète. Si cela continue, elle ne pourra pas rentrer chez elle avec sa voiture.

La journée touche à sa fin. La sonnerie retentit et chacun se réjouit d’aller enfin jouer dans la neige. Mais alors qu’ils s’apprêtaient à rentrer chez eux, les enfants apprennent une terrible nouvelle. « La situation est grave ! », annonce le directeur. « La neige a bloqué complètement la porte. Nous allons tous devoir passer la nuit à l’école ! ». Romain et ses camarades n’en reviennent pas.

« J’ai pas envie de dormir à l’école ! », dit Romain en tapant des deux mains sur la grande porte d’entrée. Tous les enfants de l’école cherchent une solution pour sortir. Les uns grimpent sur les radiateurs et essayent d’ouvrir les fenêtres. Les autres tentent de forcer la porte de la cour de récréation. Mais ils doivent se rendre à l’évidence : la neige et le gel ont bloqué toutes les issues.

« On pourrait creuser un grand tunnel », propose Romain qui, décidemment, n’a aucune envie de rester là. « Ou monter sur le toit et se laisser glisser en bas ! ». « N’y pense même pas ! », répond le directeur. « Si tu te fais mal, c’est moi qui serais responsable ». « Je peux vous signer un papier qui dit que c’est moi le responsable », répond le jeune garçon. « J’ai vu ça dans un film ».

Les enfants font la queue devant le bureau du directeur. Chacun à leur tour, ils téléphonent à leurs parents. Romain est inconsolable. Bien sûr, il aime la neige : « mais pas comme ça !», dit-il en pleurant à sa maman, à l’autre bout du fil. La maîtresse le prend dans ses bras pour le rassurer. « Venez, je sais ce qu’on va faire », dit-elle en incitant les enfants de sa classe à la suivre.

La maîtresse emmène ses élèves à l’étage, dans une grande salle magnifiquement décorée. Elle étale des matelas au sol et déniche quelques couvertures qu’elle pose sur les épaules de chaque enfant. Ils sont maintenant tous assis en cercle à écouter leur maîtresse. « Et bien moi non plus je n’ai pas envie de dormir ici », dit-elle d’une voix très douce. « Alors ensemble, nous allons veiller ».

Et ainsi, durant toute la nuit, la maîtresse raconta de jolies histoires à ses petits élèves. Exactement comme s’il s’agissait de ses propres enfants. Et lorsque le jour se leva enfin, elle annonça qu’elle ne ferait pas classe aujourd’hui. Les enfants accueillirent la nouvelle avec joie. Romain posa un doux baiser sur le front de sa maîtresse avant de courir rejoindre sa maman qui l’attendait dehors.


Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Moi j'aime la lecture (N°1 Février-Mars 2006 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.