Princesse Kalina dans "Noël dans le Grand Nord"

Mais à l’approche de Noël, Princesse Kalina affichait une mine particulièrement triste. Son professeur l’avait trouvée fort distraite ces derniers temps. Il en informa le père de la jeune princesse qui vint immédiatement trouver sa fille. Kalina était dans sa chambre, accoudée devant la fenêtre, le regard porté vers l’horizon. « Que se passe-t-il donc ma fille ? », lui dit son père, « je n’aime pas vous voir porter ainsi un regard triste sur le lointain, qui plus est, à l’approche de Noël ».
« Père », lui dit la princesse, « c’est justement l’approche de Noël qui m’attriste. Je sais que Mère et vous êtes très bons pour moi mais, chaque année depuis que je suis toute petite, vous me promettez un Noël blanc. Or, regardez, une fois encore, ce ciel bleu et ce soleil ! ». Le père de Princesse Kalina regarda au dehors et aperçut ses domestiques décorant le palais pour la fête de Noël qui devait avoir lieu dans moins d’une semaine. Et ce grand sapin vert lui parut subitement très triste.
« Vous avez raison, ma fille ! », dit soudain le père de Kalina. « Cette année, nous aurons un Noël blanc et, croyez-moi, ce ne sont pas des paroles en l’air cette fois ! », ajouta-t-il. Il sortit précipitamment de la pièce, laissant là Princesse Kalina, et il rassembla à grand bruit tout le monde dans le magnifique patio au centre du palais. Son épouse, accourue à moitié coiffée, accompagnée de sa femme de chambre s’exclama : « Quelle est donc la raison de tout ce trouble ? »
« Nous partons tous pour le Grand Nord !», clama haut et fort le père de Kalina. « Vous avez une heure pour préparer ce voyage, pas une minute de plus ! ». Princesse Kalina, du haut de l’escalier, n’en crut pas ses oreilles. Elle voulut remercier son père mais n’en eut pas le temps. Elle fut happée par sa femme de chambre qui l’emmena boucler ses affaires. Quant au père de Kalina, il s’approcha doucement de son épouse et lui glissa tendrement à l’oreille : « Cela nous rappellera de bons souvenirs ».
Tout le monde fut prêt en moins d’une heure. L’excitation était bien palpable dans la petite assemblée. La mère de Kalina fit sensation en descendant magistralement l’escalier enveloppée dans une magnifique parure hivernale. « C’est vous qui me l’avez offerte il y a quinze ans, mon cher époux », dit-elle. « J’ai rarement l’occasion de la porter ici », ajouta-t-elle. « Allons, en route ! », dit le père de Kalina. Tout le monde prit place dans les magnifiques carrosses apprêtés pour l’occasion.
La route jusqu’au Grand Nord est longue, très longue. Princesse Kalina s’inquiéta de savoir si on arriverait à temps pour Noël. Assise dans son carrosse, aux côtés de son professeur, elle apprit qu’il y avait plus de 5000 kilomètres à parcourir jusqu’en Laponie, où habite le Père Noël. « Mais à ce train-là, nous n’y arriverons jamais », dit-elle au moment où le carrosse s’arrêtait ! Le professeur rit de bon cœur, passant la tête par la fenêtre. « Puisque vous parliez de train », dit-il.
Princesse Kalina sortit du carrosse, aidée par le professeur, et découvrit un magnifique train spécialement destiné au voyage vers le Grand Nord. Son père avait fait des miracles ! Elle ne put s’empêcher de courir vers lui pour l’embrasser et en profita pour étreindre sa mère qui ne lui avait jamais parue si belle dans ses habits d’hiver. « Nous serons bien mieux installés dans ce train, qu’en pensez-vous ma fille ? », dit son père. « Si tout va bien, nous arriverons dans deux jours », ajouta-t-il.
Le voyage en train fut un véritable rêve pour la Princesse. Son professeur éprouva bien des difficultés à lui faire apprendre ses leçons. Kalina courait de wagon en wagon, à l’affût du premier flocon de neige. Lorsque celui-ci apparut, elle fut la première à le remarquer. On arrêta le train et elle descendit en courant dans les champs qui se couvraient petit à petit d’un doux tapis plan. Elle se mit à danser, pieds nus, comme si elle cherchait à rendre hommage à l’hiver qu’elle n’avait jamais connu.
Plus le train avançait, plus la nuit semblait éternelle. Princesse Kalina posa mille questions à son professeur : sur le nom des villes où l’on passait, sur la langue que l’on parlait dans le Grand Nord,... Epuisé par sa jeune élève, le professeur s’endormit. Kalina s’empara des livres du professeur et s’enferma dans sa couchette. Au petit jour, le train se mit à ralentir : on approchait du but ! Kalina, qui n’avait pratiquement pas dormi du voyage, réveilla tout le monde.
Lorsqu’elle descendit du train la première, Kalina ressentit une grande joie. Malgré le froid, Noël ressemblait ici, dans le Grand Nord, à l’idée qu’elle s’en était toujours faite. Sa joie grandit encore lorsqu’elle apprit que la route se poursuivrait sur des traîneaux tirés par de grands rennes. Invitée par un vieil homme barbu à monter sur un de ces traîneaux, elle n’hésita pas un instant. Le vieil homme l’emmitoufla dans une épaisse couverture et fouetta l’air pour inciter les rennes à démarrer.
La neige tombait en épais flocons sur la campagne traversée par Kalina, ses parents et toute la suite princière. Le convoi arriva enfin aux abords d’une somptueuse demeure qui ressemblait à un palais de glace. Un couple princier qui semblait connaître les parents de Kalina depuis longtemps accueillit chaleureusement tout le monde. Kalina traversa l’entrée du magnifique palais au bras du Prince Artus, un beau et galant jeune homme qui l’accueillit avec tous les égards dus à une princesse.
A l’intérieur du palais, tout était déjà en place pour Noël. La veillée avait lieu ce soir même et les domestiques s’afféraient pour que tout soit parfait. Kalina refusa le repos conseillé par son professeur. Elle préféra la compagnie du jeune prince dont elle s’étonna qu’il parle si bien sa langue alors qu’elle ne connaissait aucune langue du grand Nord. Le Prince Artus et la Princesse Kalina ne se quittèrent qu’en fin de journée, afin de se préparer pour la grande soirée de Noël.
Kalina descendit l’escalier au bras de son père. Sa longue robe de soie rouge illumina le palais et les yeux du Prince Artus qui prit la relève à son bras. Kalina et le jeune prince dînèrent face à face, sans se quitter des yeux. La princesse rougit un peu lorsqu’elle croisa le regard de ses parents. Sa mère la prit à part et lui raconta comment elle avait rencontré son père, il y a quinze ans, ici même, à l’occasion de Noël. Kalina, ravie de cette confidence, retourna près du Prince Artus.
Après le dîner, tout le monde se rendit dans une immense salle lumineuse. Le prince invita Kalina à ouvrir le bal de Noël. Elle accepta l’invitation et, sous les yeux ravis de ses parents, elle fit au Prince Artus une démonstration de ses talents de danseuse. Pour lui, et toute l’assemblée médusée par tant de grâce, elle exécuta des pas de flamenco, une danse que le prince ne connaissait pas. « Je vois que j’ai tout de même des choses à vous apprendre », lui dit-elle, fière d’elle.
La nuit passa trop rapidement. Mais ce fut l’une des plus belles de la jeune existence de Kalina. Les adieux au prince furent longs mais joyeux. « Lorsque tu viendras chez nous l’an prochain, je connaîtrai ta langue », dit Kalina au prince. « Et moi je danserai le flamenco mieux que n’importe qui », lui promit Artus. Ils échangèrent un long baiser avant de se quitter. Depuis lors, on raconte qu’une année durant, on entendit beaucoup parler une drôle de langue dans un palais des bords de la méditerranée.
Texte protégé par la loi sur le droit d'auteur; écrit par Vincent Fournier et publié dans le le magazine Histoire de Fées (Novembre-Décembre 2005 - édité par GO MULTIMEDIA SARL). Tous droits de reproduction et de traduction réservés pour tous supports et tous pays.
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